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L'Atelier d'écriture de Villejean

1 décembre 2020

Portraits. 1, Mes aïeux / Eliane

AEV 2021-10 Eliane mariageDans la vieille maison, maintenant délestée de ses habitants,
Sur la commode patinée par de nombreuses couches de cire, 
Mes aïeux le jour de leur noce.
J'imagine ce cliché pris au son de la marche nuptiale.

Que vous êtes beaux,
Grand-mère Eléanore et grand père Louis !

Sur une autre photo on voit Clémence en vacances
Avec son cousin Baptiste.
Ils ont passé dans cette vieille maison de merveilleux étés.
Ils jouaient à « Balan-balançoire »
Ou encore à « Chat, c'est toi l'chat »
Clémence avait apprivoisé un escargot
L'escargot Léo. C'était leur compagnon de jeux
Qui mangeait quand même les salades de grand-père.

AEV 2021-10 Eliane amoureux 3

 

Le soir ce dernier leur lisait des histoires,
Tandis que Grand-mère chantait
Des berceuses aux petits vampires,
- Quand ils étaient tout petits,
Elle disait qu'ils lui mangeaient tout son temps -
Puis des berceuses pour un ouragan.

 

Il y avait souvent des réparations à faire
Après leur séjour à la fin de l'été.

Je ne vous ai pas connus assez longtemps,
Mes chers grands-parents.
J'aurais pourtant eu tant de choses à vous dire
Et tant de choses à vous demander.

AEV 2021-10 Eliane grands-parents

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1 décembre 2020

Portraits. 2, Xavier / Eliane

AEV 2021-10 Eliane amoureux

Je l'avais rencontré au cours de ce merveilleux été.
Nous étions une bande d'amis et nous avions cuisiné des nouilles.
Je m'étais dit : « Il est parfait ! ».
Depuis que je l'attendais, mon prince charmant !

Une gentille sorcière pas comme les autres
M'avait appris quelques trucs pour envoûter mon amoureux
Comme se vêtir de moire et de satin.
Cela n'a pas suffi
Il n'a été qu'un de ces amours d'été.

Quand il est parti, je sanglotais :
Pas encore, pas déjà ?
Ô Xavier, ça va faire drôle
De ne plus sentir tes bras qui m'étreignent
Ni la douceur de tes baisers !

Et puis un jour,
Dans le brouillard de l'automne,
Par les champs inondés,
Alors que je progressais difficilement
Deux mains se sont posées sur mes yeux :

- Devine comment je m'appelle !

- Xavier, je te cherchais déjà !

- Me V'la !

Nous avons repris nos confidences et nos étreintes
Dans la chambre d'or.
J'avais eu tort de faire partie des gens qui doutent.

AEV 2021-10 Eliane amoureux

1 décembre 2020

Portraits. 3, Clémence / Eliane

Je m'appelle Clémence comme ma grand-mère.

J'étais la femme du vent
Maintenant je suis une vieille dame.
Il me revient en mémoire
Une histoire ancienne, douce-amère.

Quand on s'est connu
Ce n'était même pas un coup de cœur.
J'étais sage
Mais j'ai eu envie, rien qu'une fois,
De faire des vagues
Alors nous nous sommes mariés
Contre l'avis de nos familles.
C'était joyeux, comme un jeu.

AEV 2021-10 Eliane ClémenceMais dans la vie en vrai, tout n'était pas si rose.
Mon mari est parti.
J'avais le cœur à l'ombre,
Il ne me restait qu'un mur pour pleurer
Avec le cœur sur les bras.

C'est une triste histoire
Mais le temps a passé.
Même s'il est trop tard pour être une star
J'occupe une maison pleine de fenêtres
Et de rires d'enfants.

1 décembre 2020

Acrostiche / Raymonde

A
N
N
E

S   'il fallait faire la guerre
Y   faut par les champs inondés
L   'éternelle histoire
V   alse marine
E   t dans le brouillard d'automne
S   i je ne parle pas
T   rès gentille et désespérée
R   ien qu' une fois faire des vagues
E   crire pour ne pas mourir.
 

1 décembre 2020

L’escalier qui monte jusqu'au ciel / Raymonde

Il y a Georges avec son gorille qui voudrait voir ses copains d’abord, Serge et son petit garçon (tellement beau mais tellement triste), Richard - il s’appelait Richard - qui entend siffler le train (en fait c’est son sonotone qui déconne), Christophe qui cherche toujours Aline et Jacques, le grand Jacques, qui se croit dans le port d’Amsterdam avec Ronde Madeleine à qui il veut offrir des bonbons ! La Môme Edith qui n’a pas toujours eu la vie en rose ! Et puis Frida Oum Papa, la bonne du curé qui met une ambiance folle !

Ils sont venus, ils sont tous là, Charles !

- Anne, te voilà ! Viens, viens, prends ta guitare et pousse la fabulette !

- Vous ne me parlez que de mes fabulettes mais j’ai été une artiste engagée et puis j’ai tant de choses à vous dire ! Je vais vous fredonner une chanson grise en do. Valéry, prends ton accordéon ! 

Mais Anne a un espoir fou :

- Depuis le temps que je l’attends, mon prince charmant ! C’était ce merveilleux été de « L’idole des jeunes » en 1962. J’avais 28 ans, il en avait 19. Tout ça c’est de l’histoire ancienne, je suis une vieille dame maintenant. Quand mon mari est parti, j’ai tout fait pour le rencontrer. J’ai même teint mes cheveux en blond car il aimait "les blondes", Sylvie, Laeticia... Mais où est-il ? Je n’ose pas demander de peur de passer pour une midinette ! Bon, allez, si, j’ose ! Vous n’auriez pas rencontré quelqu'un qui a quelque chose de Tennessee ?

- Si, si, mais quand il est arrivé, il a dit qu'il voulait allumer le feu. Alors, il entretient les flammes de l’enfer !

AEV 2021-10 Raymonde - Allumer le feu

 

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1 décembre 2020

Anne et Maryvonne / Maryvonne

«Pleure, pleure Maryvonne
Ton ami je te l'ai pris ;
Ça n'a étonné personne,
Le village en a bien ri. 

Comme il n'était pas malin
N'en suis pas du tout chagrin !
V'là que dans « Petit Bonhomme »
Mon mari devient ton homme.

 «Le mari de Maryvonne était mon amant.»

Décidément !
De nouveau c'est un échec !
Tu as du mal avec mes mecs !

Je pourrais t'en vouloir
De peindre ma vie en noir :
Du cidre j'ai bu toute la bouteille
Je n'sais plus comment j'm'appelle.

AEV 2021-10 Maryvonne 20201203_144410 (réduite)Anne, ce qui me fait chagrin
C'est la nouvelle d'un matin
Quelque chose de bien moche
Qui dit qu't'as fait ta valoche.

Fini notre contentieux
Tu chanteras depuis les cieux.
Nous avons été si proches
Autour des chansons pour mioches
Fabuleuses Fabulettes
Et chansons pour les minettes.

Pour beaucoup de féministes
Tu nous as ouvert des pistes.

Fini le bal des champignons
A l'école qui porte ton nom !



C'est dans un tout petit bourg

Tout près du fameux Combourg ;
A Dingé où je suis née
On ne t'a pas oubliée.

La vieille école aux murs tout gris
Lecture, écriture elle m'a appris ;
C'est de l'histoire ancienne
Mais voilà, juste la mienne.

La nouvelle école est moderne.
Plus colorée moins terne,
Claire et pleine de fenêtres
Et s'appelle « Anne Sylvestre ».

AEV 2021-10 Maryvonne Ecole Anne Sylvestre (réduite)

AEV 2021-10 Maryvonne Inauguration Ecole Anne Sylvestre

1 décembre 2020

Entre les trous de la mémoire / Jean-Paul

Appia 01 B Entre les trous de la mémoire

T’en souviens–tu, la Seine ? Ou plutôt vous en souvenez-vous de mes virées le long de vos quais ?

Oui, je sais, c’est de l’histoire ancienne et ce n’est pas vous que je regardais. Je farfouillais dans les bacs verts des bouquinistes où je trouvais quelquefois, tel le pêcheur de perles, des trésors de papier.


C’est drôle comme avec les années qui cognent mes dix ans à Paris sont devenus quelque chose de flou. J’étais à l’époque un drôle de petit bonhomme, discret comme un personnage de Sempé, qui allait écouter en concert des gens comme Higelin, Steve Hackett ou Neil Young, fréquentait assidûment le cinéma Olympic, le Studio 28 ou ceux du Quartier latin, lisait énormément et c’est sans doute chez Gilbert jeune, sur le boulevard Saint-Michel, que j’ai trouvé ce poster de Dominique Appia.

Billet de concert Neil Young 3-03-76

Il ne fut pas difficile d’ajouter une image aussi bizarre à mon mystère ambiant et à mon studio d’intello miteux. Pour une solitude comme la mienne la science-fiction, l’imaginaire, le rêve étaient le carburant dont j’avais besoin pour être bien dans ma fusée.

Je m’étonne, aujourd’hui que je suis devenu un dinosaure, de n’avoir jamais éprouvé d’inquiétude devant les tableaux d’Appia, de Magritte ou de Delvaux. Famille pour famille, les beaux enfants des peintres surréaliste m’ont accompagné pendant quarante-quatre saisons et si j’écrivais de la poésie douce-amère à l’époque, je n’ai jamais pensé qu’il fallait écrire pour ne pas mourir. J’avais la légèreté du flocon papillon et l’ai sans doute encore.

Le centre du motif, ce tas de livres qui brûle à même le plancher dans un appartement ouvert aux quatre vents ne m’a jamais semblé un symbole oppressant. La glaciation du temps à gauche, le buste de géant dans la pièce plus sombre et le miroir vide ne m’ont jamais mis le cœur à l’ombre. Je ne me suis jamais vraiment demandé ce que ça fera le jour où ça craquera. Peut-être que je suis au fond aussi inconsistant que les deux enfants du tableau qui n’ont ni ventre ni sexe et rêvent de prendre un bateau demain pour arriver à La Rochelle par la mer, de visiter les cathédrale de Gulliverte, d’entendre l’histoire des douze petits cochons ou de redresser la tour penchée de Pise.

Et pourtant, Madame la Seine, je ne suis pas qu’un rêveur Lennonien. J’ai toujours fait la vaisselle chez moi, toujours bossé sans à-coups et il aura fallu, pour qu’on m’apprivoise, qu’une sorcière comme les autres - ou pas ! - vienne me faire l’honneur d’une valse marine. On s’est connu, on s’est reconnu et on ne s’est pas séparés. J’ai suivi la femme du vent dans son pays bleu de western breton. L’éternelle histoire !

Voilà pourquoi je ne connais plus personne à Paris, à part vous. J’aurai tant de choses à vous dire si un jour je reviens mais si je ne parle pas ne vous inquiétez pas. Je sais que vous êtes une porteuse d’eau, que votre temps est précieux et que vous avez à faire par les champs inondés. L’Apollinaire enfant qui pleure sur le pont Mirabeau ou l’adepte de la java d’autre chose qui arrive avec ses « Me v’là ! J’ai une lettre ouverte pour Madame Elise LaSeine que c’est même pas grave si c’est Thérèse dans la vie en vrai», je comprends très bien que ça vous glisse dessus.

1 décembre 2020

B comme baromètre / Adrienne

AEV 2021-10 Adrienne

La première chose qu’il fait le matin en pénétrant dans la cuisine-pièce à vivre-et-à tout faire, là où il y a aussi les deux bergères en skaï bleu, le poêle à charbon et la télé, c’est un léger toc-toc au baromètre.

Mini-Adrienne n’a jamais compris cette passion pour le temps qu’il a fait, qu’il fait et qu’il fera, quatre saisons sur quatre, qu’on ait à sortir ou pas, et même les jours où ce n’est pas difficile à constater à l’œil nu, juste en regardant dehors. Mais grand-père y met un point d’honneur, chaque matin au lever, chaque soir au coucher, un toc-toc au baromètre.

Douce maison du côté heureux de l’enfance, quand grand-père enlaçait grand-mère, l’arrachant à sa vaisselle, pour danser "La vie en rose".

Douce maison des moments heureux où mini-Adrienne se disait que ça existait donc dans la vie en vrai, des gens qui s’aiment.

Merci, oh merci d’avoir été là. Tant de choses encore à vous dire…


N.B. Les titres de chansons insérés dans ce texte : 

– Bergère – Bleu – Dans la vie en vrai –– Douce maison – Grand’ mère –– La vaisselle –– Le baromètre –– L’honneur –– Merci, oh merci –– Pas difficile –– Quand on dansait la vie en rose – Quatre saisons –Tant de choses à vous dire –

Le tableau de Norman Rockwell a été emprunté sur le site-atelier de Lakévio que nous remercions et saluons au passage.

24 novembre 2020

Consigne d'écriture 2021-09 du 24 novembre 2020 : Dominique Appia

Tableaux de Dominique Appia

 

Saurez-vous vous laisser inspirer par une ou plusieurs des 23 toiles de Dominique Appia, peintre surréaliste suisse (1926-2017), que nous avons rassemblées ci-dessous ?

On peut les voir en un peu plus grand grâce à « Bruitsdeplume » à cette adresse :

https://www.flickr.com/photos/manche-pixels/albums/72157714918636663

Si les images ne vous suffisent pas, vous pouvez insérer dans votre texte des titres de ses œuvres ou des mots constitués avec les lettres de son patronyme complet. Ceci est facultatif.

Si cela pouvait être une lettre envoyée par X à Y, ce serait pas mal non plus. Facultatif aussi.

Titres d’œuvres :

13 bis rue des Canettes - Architecture de la Renaissance - Au jardin botanique - Au pied du mur - autoportrait - Berthe vue à vol d'oiseau - Crystal Palace - Désidérata - En Provence - Entre la lumière et l'ombre - Entre le secret et le danger - Entre les trous de la mémoire - Extrême jonction - La carte postale - La leçon de perspective qui est au bout du fil - La Place du cirque - La visite - Le génie de la liberté - Le grand voyage - Le palais - Le silence - Le songe retrouvé - Le temps des gares - Les pages du dictionnaire - Maturité - On a la chance que l'on mérite - Où va le temps qui passe ? - Oui, montagneuse est ma passion - Un papillon sur l’épaule - Vive l’esprit !

Anagrammes de Dominique Appia :

appuie-main - dopamine - maniaque - amadoué - diminue - domaine - épanoui - impunie - indique - minaude - modique - moineau - Monique - oppidum - panique - poupine - amadou - amande - amidon - appeau - appuie - aumône - Damien - demain - démuni - dénoua - domine - douane - épandu - idiome - idoine - impuni - inique - inouïe - madone - manipe - manque - médian - monade - naïade - niaque - nomade - opaque - padoue - panade - papoue - penaud - péquin - pineau - pipeau - podium - pondue - poupin - quidam - quinoa.


Consigne_AEV_2021_09_Livret_Dominique_Appia

24 novembre 2020

Le Grand voyage / Maïck conteuse

AEV 2021-09 Maïck pluie 01

Depuis des semaines, la pluie n’avait pas cessé. Gouanag regardait, jour après jour, les trombes d’eau crépiter sur la rivière.

Mais ce matin, en se réveillant, une ambiance insolite l’interpelle. Quelque chose a changé. Oui… Le silence ! La pluie a cessé ! Et puis ce mouvement imperceptible….

Gouanag se précipite sur le pont. Il n’y croit pas ! Le bateau, cette vieille épave, part doucement au fil de l’eau ! C’est impossible, que s’est-il passé ?

On ne va pas refaire le coup du déluge quand même ! Et de l’Arche de Noé ?

Appia 08 BIl regarde autour de lui, plus de rives, plus de maisons le long de la rivière…Tout a disparu ! Il rêve, se pince, non, tout est bien réel… Mais comment le bateau va-t-il tenir ? Il n’est plus capable de naviguer depuis longtemps, il le sait bien. Il l’a étudié sous toutes les coutures depuis qu’il a élu domicile dans ses flancs. C’était … quand ? il y a bien longtemps… Il ne sait plus ce qui l’a amené là, enfin si…

***

Il y a longtemps que Gouanag s’est retiré du monde, il ne compte plus les jours depuis que ses pas l’ont happé pour le mener nulle part.

Il avait marché au hasard, ruminant ses échecs, ses espoirs déçus, ce monde qui l’avait mené au bord du vide.

Pendant des jours, mécaniquement, il avait parcouru les chemins. Evitant les rencontres et les questions dans le regard des autres. Jusqu’à ce petit matin où le soleil s’était levé sur ce fond d’estuaire. Une carcasse de bateau échoué, déjà envahie par les roseaux, se détachait sur l’aube naissante. Là, pour la première fois, dans son errance, il s’était senti bien, pénétré d’une douce paix intérieure.

Il avait observé cette épave pendant de longues minutes, regardé les oiseaux tourner dans le ciel, écouté le silence puis s’était décidé à s’approcher.

Plus il avançait, plus les détails se dessinaient et plus son cœur accélérait son rythme. Une sorte d’affolement exaltant l’avait submergé, il s’était mis à chercher fébrilement comment monter sur cette sorte d’îlot.

Il avait dérangé mille animaux fantômes. Une fois à l’intérieur, il s’était assis sur une vieille banquette et avait écouté mille petits bruits, scruté les zones d’ombres.

L’intérieur était délabré mais pas pourri, avec un peu de nettoyage, il pourrait y aménager un abri temporaire.

Après quelques jours d’exploration, de questionnement, de recherche de ce qu’il pouvait récupérer pour bricoler un intérieur décent, Gouanag s’était senti bien et sans s’en apercevoir, avait finalement décidé de rester là. Loin du monde, derrière le rideau de roseaux, il était bien, apaisé. Il avait l’impression que le bateau lui parlait dans ses rêves.

AEV_2021_09_Ma_k_Goanag

Un jour, il avait découvert, en grattant, une plaque avec le nom du bateau : Gouanag !

Comme lui… Espoir, quel beau nom pour un bateau, que d’aventures en son ventre !
Espoir, lui, avait toujours trouvé son prénom ridicule. Quelle idée avaient eu ses parents ! Heureusement, personne ne connaissait la signification de ce prénom Breton et il se gardait bien de répondre aux questions !

Au fil des jours, il s’était installé dans cet îlot miraculeux.

Dénichant quelques vieux outils, il avait réparé, cloué, vissé… finalement c’était devenu plutôt cosy !

Il avait fini par être admis par ses co-locataires. Ragondins, lapins, oiseaux, tous semblaient s’y faire et finalement la cohabitation se passait harmonieusement.

Il pouvait leur parler. Ils étaient devenus ses animaux de compagnie, leur racontant ses rêves, ses cauchemars, sa vie quoi !

Ces petits animaux étaient plutôt intelligents et ils se comprenaient à merveille.

Parfois, au début, il sortait et parcourait les kilomètres qui le séparaient du premier village, faisant quelques courses. Les villageois le dévisageaient, se demandant bien où il créchait. Il éludait toutes les questions et repartait avec ce que Pôle emploi lui permettait charitablement. Il savait que ça ne durerait pas longtemps ! Il avait fini par acheter une poule et un coq dans une ferme sur le chemin, puis une chevrette.

Il l’avait achetée sans savoir qu’elle était pleine, il s’en était rendu compte quelques semaines plus tard. Bah, le rafiot était bien assez grand pour accueillir tout ce petit monde !

Si bien que quand la source Pôle emploi s’était tarie, il était prêt ! La vie avait coulé comme ça, doucement, au gré des saisons. Il y avait toujours quelque chose à faire sur le bateau, il ne s’ennuyait pas.

Et puis la chaleur s’était intensifiée. Pour se protéger, il avait planté et cultivé sur le bateau même, charriant la terre du pré derrière les roseaux. Il avait aménagé un petit potager, avec carottes, navets, poireaux, tomates. Un coin d’herbes aromatiques et même un noisetier, des framboisiers, cassissiers, fraisiers. Un saule avait aussi poussé sans demander son avis, il l’avait laissé. Il se servait de ses souvenirs de l’université et de sa vie professionnelle, finalement ça lui servait quand même !

Son bateau était devenu presque invisible, comme une île flottante.

Combien de temps s’était-il passé depuis son arrivée et le début des orages et des pluies torrentielles ? Dix ans, douze ans ? Il n’arrivait plus à tenir le compte.

AEV 2021-09 Maïck arche 01

Quand il avait largué les amarres, un virus s’était insinué dans tous les interstices de la vie et n’en finissait pas de décimer ses collègues et congénères. Il l’avait chopé, s’en était sorti mais dans quel état ! C’est là qu’il avait commencé à dériver.

***

Bon, pas la peine d’y revenir. Là, maintenant que faire, à part se laisser guider par son bateau ? Où cela va-t-il l’emmener ? Sa bonne fée Gouanag va-t-elle veiller sur lui ?

Oui, confiance, elle va le pousser vers une autre terre. Oui, il en est sûr ! Il ne pleut plus, le soleil brille ! Et vogue la galère, sur son petit paradis personnel !

Allez Noé ! Bon il n’y a pas de Emzara, mais qui sait, avec un peu de chance… sur un autre caillou, quelque part dans l’univers…

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