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L'Atelier d'écriture de Villejean
28 février 2023

Sept portes / Adrienne

– Le concept est tout neuf et très prometteur, affirmait le directeur – qui ne voulait pas être appelé directeur – d’ailleurs la liste d’attente est fort longue pour entrer ici!

– Malgré le prix, émit-elle, qui s’entêtait à l’appeler Monsieur le Directeur.

– Malgré le prix, en effet.

On voyait que cette remarque lui déplaisait.

– A ce propos, voyez l’énorme éventail d’opportunités que notre nouveau concept offre. Vous a-t-on déjà fait visiter le couloir aux sept portes ?

– Non, et j’ai hâte de le découvrir avec vous !

Une petite flatterie ne ferait pas de tort, elle le voyait bien.

– Alors nous voici devant la porte Mutabor : pour ceux qui aimeraient se transformer en animal, ou en plante.

– Intéressant ! fit-elle.

Mais sa petite moue était dubitative.

– Ensuite nous avons une porte réservée aux messieurs – pardonnez-moi, ici de nombreuses personnes raisonnent encore en termes binaires – c’est ici : Oh, puissé-je avoir mille langues !
Oui, je comprends votre étonnement, mais tout ou presque est dans l’idée, n’est-ce pas ?
Nous proposons aussi la sagesse de l’Orient pour ceux qui veulent atteindre la spiritualité – je sais ce que vous allez me dire, c’est banal, chacun le fait, je vous l’accorde – mais nous sommes assez fiers de la suivante : Le summum de l’art, la transformation du temps en espace dans la musique.
Ah ! Non ! Je ne vous en dirai pas plus, c’est notre petit secret ! La concurrence est rude, vous comprenez.
Passons rapidement à la suivante, Jeux destinés aux ermites, des substituts parfaits à toute sociabilité.
Une chose vraiment indispensable dans un endroit tel que celui-ci, cela va sans dire !
L’autre indispensable, c’est le cabinet d’humour, on y entend toujours pleurer de rire !
Et finalement, juste à côté, en toute logique, la dernière porte, celle du suicide agréable qui vous fait mourir d’un éclat de rire.

De retour à sa voiture elle se dit que la seule porte qu’elle franchirait, ce serait celle pour aller à la piscine.

N’était-ce pas incroyable qu’en ce merveilleux jour de juillet, elle n’intéressait aucun des résidents?

– Il y a décidément du mystère là-dessous, conclut-elle en mettant le moteur en marche.

Photo prise à Bruxelles, Villa Empain, à l’occasion de la visite d’une expo.

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28 février 2023

Couloir magique / Dominique H.

Un couloir avec des portes ouvrant sur différents paysages

Soudain, me voici propulsée dans ce fameux couloir magique. Trop bizarre ! Ses parois sont animées de mouvements de distorsion. Elles cherchent à se rapprocher de moi. Leur matériau semble vivant. J'avance prudemment le pied droit pour essayer de toucher la plinthe. Aussitôt, le mur, très mobile, et même fluide, entoure mon extrémité et l'isole comme une île. C'est un mur à pseudopodes qui veut me phagocyter la jambe. Je la retire vivement mais, dans l'instant, le sol se gondole et mon pied gauche tombe dans un trou incandescent étonnamment glacé.

Au plafond, une pyramide de cristal filtre une lumière blanche et la décompose dans les six couleurs de son spectre. Je patauge en plein arc-en-ciel. Cette ambiance psychédélique ne diffuse aucune musique ni aucune odeur. Il fait froid et seul un sifflement lancinant évoque le bruit de la bise. Fuir !

Voici une porte blanche, immobile et fixe, anormalement normale avec une vraie poignée. Seule étrangeté, une inscription hermétique «  Mutabor » qui devrait m'inciter à réfléchir deux fois avant d'ouvrir. Mais je ne suis pas en état de réfléchir d'autant plus que j'ai lu «  Monte à bord ». ! J'entre. Un énorme tuyau m'aspire et la porte se referme derrière moi en claquant. Le paysage a changé. Maintenant c'est un couloir cylindrique rigide, sans boursouflures. Mes mains se posent sur les parois, elles sont lisses et ne se dérobent pas sous mes doigts. Le sol est une mousse verte, souple, tiède, humide, d'où monte un parfum de sous-bois. La lueur est rose comme l'aurore et au bout du tunnel, un soleil se lève. L'ambiance est douce et feutrée, le vent est tombé. Je progresse lentement sur cet épais tapis, vers la lumière. Soudain le tuyau s'arrête. Le bon sens m'est revenu et je m'arrête aussi. C'est le vide, ou plutôt le ciel ! Je me pince, je ne suis pas morte. Pour me rassurer, une mer de nuages joufflus, bien blancs, m'offrent leurs rondeurs comme pour m'inviter à sauter. Serais-je encore sous substance ? Dégrisée ou pas, je n'écoute que mon élan vital et mon besoin de douceur et je saute, dans le vide ! 

AEV 2223-21 Dominique - Oies cendrées

Miracle ! La fonction crée l'organe, c'est bien connu. Instantanément mes poils se transforment en plumes, mes bras en ailes, mes pieds se palment et je sens mes jambes se coller sous mon ventre. Mon profil prend une forme aérodynamique, mes yeux voient un bec jaune s'allonger en une spatule décorée de deux narines. Je suis devenue une oie cendrée et je vole, je vole réellement. Ma légèreté nouvelle m'enchante. Demain c'est le mois de Mars et je migre vers le Nord.

AEV 2223-21 Dominique - Etang de MordellesJe suis une oie cendrée du vingt-et-unième siècle et mon cerveau est équipé d'une puce GPS qui me renseigne en temps réel sur ma position. Ce matin je survole les étangs de la rive droite de la Vilaine, au sud de Rennes. Le temps est clair, et le paysage est magnifique vu du ciel, une mosaïque de bleus et de verts. Je ne résiste pas, je vais me poser. En plus du GPS, mon cerveau est équipé d'un pilote automatique, mes ailes savent freiner précisément et c'est en douceur que mes pieds palmés vont se poser sur un îlot de prairie verte décorée de trois pins sylvestres. Je suis sous le charme, je regarde, je respire. Voici la longue fourrure noire d'un animal qui nage à la surface de l'eau. Mon Wikipédia intégré me fait savoir que c'est une loutre. A mes pieds une primevère, plus loin une jonquille, l'air sent le printemps. Et encore un peu plus loin, se dandinant dans une apparente indifférence, un beau mâle cendré de mon espèce qui semble ne pas m'avoir encore vue. Soudain, je sens une bouffée de phéromones m'ébouriffer les plumes et diffuser leur parfum dans l'air, et voici que le beau mâle cendré me regarde. Que la vie sur terre est belle !

AEV 2223-21 Dominique - prairie puzzle

28 février 2023

Théâtre magique / Laura

Mutabor : ce n’est pas très original mais je choisis d’être un oiseau pour voir le paysage comme d’un avion mais en mieux encore.

Kamasutra : apprendre à prendre et donner du plaisir avec mon genou sur lequel je ne peux m’appuyer… et mourir en jouissant : effrayant pour l’autre mais quel kif !

Voulez-vous atteindre la spiritualité ? Sagesse de l’Orient. J’y retrouverais mon cher Nerval qui me ferait notamment découvrir les terres des Druses et des Maronites.

Déclin de l'Occident. Prix réduit. Spectacle encore inégalé. Je ne tournerais pas dans un porno avec Houellebecq ; par contre, j’aimerais discuter avec Finkielkraut.

Le summum de l'art : la transformation du temps en espace dans la musique. J’y rencontrerais Kandinsky et Baudelaire pour évoquer la théorie des Correspondances.

Pleurer de rire : cabinet d'humour avec les sociétaires des Grosses têtes pour des blagues de cul, sexistes et politiquement incorrectes.
Comment construire sa personnalité : m’affirmer, me vendre.

Joignez vous à la joyeuse battue ! Grande chasse aux automobiles. Après les avoir descendus de leurs voitures, je les toiserais comme ils le font avec moi en piétonne.

Un loup dans le couloir d'un théâtre

Image fabriquée sur commande par Deep Dream Generator

28 février 2023

Mutabor / Jean-Paul

La bière, la bière ! Mais qu'est-ce qu’elle nous fait faire, la bière? Avec mon jumeau astrologique inversé, on l'a presque vidée, la bouteille de Maredsous ! À l'entrée de chez lui, par provocation, sur la porte de sa maison rouge, il était affiché : « Jeux destinés aux ermites : substituts parfaits à toute sociabilité. »

C'est un peu vrai. Quand on est chez lui ou quand il vient chez moi, le monde peut bien s'écrouler, l'Occident décliner, Greta Thunberg et des tas d'autres se joindre à la joyeuse battue organisée par les chasseurs d'automobiles. Nous on s'en fout joyeusement. Nous, on joue de la guitare et on chante. Enfin, je lui apprends à jouer de la guitare, à ne pas se lancer dans « Bella » de Maître Gims sous prétexte qu'il connaît les 4 accords de cette chanson inchantable. Pas sociables, nous ? Mais alors qu'est-ce qu'on fait dans ce théâtre magique à répéter ensemble « Les couleurs du temps », « Mistral gagnant » et « Emmenez-moi ? Qui est ce qui fait un marathon de cinq heures de chanson française dans les rues de Rennes tous les 21 juin que Gott nous fait ?

C'est vrai qu'en creusant un peu on peut s'apercevoir que mon jumeau astrologique inversé - appelons le Hermann Zack pour le coup – est, psychanalytiquement parlant, le roi de l'explosion en vol. D'ailleurs notre dernier groupe de musique s’est dissout à cause de ça.

2023-02-27 - 285 2

Du coup la deuxième partie de l'après-midi du lundi, on la passe à jouer aux échecs. Et là, devant l’échiquier – ukrainien, l’échiquier ! - j'assume comme une bête le retour à l'état sauvage, l’absence de sociabilité, le retour à l’animal. Je pousse la porte de la salle Mutabor et je me transforme en serpent. J'attends. Mon adversaire, mal assuré, pousse ses pions, avance ses pièces et puis, à un moment donné, j'applique la position 43 du Kamasûtra : je lui serre le kiki ! Je lui enferme son fou, je lui mange petit à petit trois de ses pions, je lui fais un mat du couloir et plus aucune de ses portes de sortie ne s'ouvre ! J'évite alors de partir dans un éclat de rire : quand j’ai gagné, je redeviens sociable et j'explique, sérieux comme un pape, bienveillant comme un évêque, à quel endroit de la partie mon adversaire s'est trompé, comment il a fait pour se suicider symboliquement.

J’avoue, je suis un drôle de loup des steppes et ce soir, par exemple, dans le corridor du théâtre magique j'ai laissé de côté les aspects libidineux que réveille la bière : je n'ai pas poussé la porte marquée « Toutes les jeunes filles t'appartiennent! Mettre un mark dans la fente ». Je laisse à d'autres la chair fraîche du petit Chaperon rouge. Surtout, en regardant dans mon porte-monnaie, je n'ai trouvé que des euros et pas de mark.

Non, j'ai mieux. Je suis rentré chez moi, j'ai rangé ma chariotte, posé ma guitare et j'ai allumé mon ordinateur. Depuis dimanche dernier je connais un cabinet d'humour dans lequel on peut pleurer de rire. C'est une amie de Chartres que je n’ai jamais rencontrée, une blogamie comme on dit, qui m'a donné l'adresse. C’est encore plus magique que d'écrire soi-même ou d'essayer d'atteindre le summum de l'art en suant sang et eau sur la transformation du temps en espace dans la musique. Cela s'appelle Deep Dream Generator et c'est... un robot génial et stupide qui peint des tableaux sur demande !

Bien sûr le littéraire amoureux du passé que je suis ne peut s'empêcher de penser à cet univers du 19e siècle et aux précédents, époques où le selfie et la photographie n'existaient pas, et d'imaginer un bon bourgeois ou un vieil aristocrate commandant à un peintre le portrait de son épouse ou de sa maîtresse en lui intimant de représenter des éléments de décor particuliers.

- Comment, Monsieur le marquis, s’étonne le peintre Manet, vous voulez que je représente Madame toute nue dans un pique-nique en pleine nature avec des messieurs habillés ?

- Comment, Oncle Eugène ? Vous voulez vraiment que je pose avec la robe rose que mon beau-père m'a offerte pour mon anniversaire et que je mette ces fleurs qui puent dans mes cheveux ? La robe ne me va pas, les macarons non plus, je vais avoir l'air d'une godiche pour les siècles des siècles si vous me peignez comme ça ! Bon allez, ne pleurez pas ! J'accepte mais vous promettez de ne jamais l'exposer nulle part, votre portrait d’Isaure Chassériau, hein !

Bref depuis dimanche dernier je suis devenu drogué de ce truc dont je ne puis même pas dire qu'il est réservé aux insensés puisque tout le monde peut y accéder à condition d'ouvrir un compte sur le site internet.

Bien sûr, c'est gratuit. Bien sûr, c'est 1984 d’Orwell : dans la mémoire centrale d'un nouvel oncle Sam devenu roi des espions tout ce que je demande à l'intelligence artificielle de me réaliser comme image est noté, enregistré et sera retenu à charge contre moi un jour.

Oui j'ai bien demandé à la machine de me représenter « La Vierge Marie qui chante en s'accompagnant sur un ukulélé rose ».

La Vierge Marie joue de la musique sur un ukulélé rose

Oui j'ai bien commandé « Venise sous la neige avec des patineurs sur le Grand canal peint à la façon de Bruegel ».

Venise sous la neige façon Brueghel

Oui j'ai bien pleuré de rire en voyant « une panthère rose et Sherlock Holmes » : la bécane m'a représenté Holmes et Watson en costumes roses et la panthère est devenue un chapeau !

A pink panther and Sherlock Holmes

Oui j'étais écroulé d’avance en tapant « Trois femmes nues attendent le train dans une gare la nuit à la façon de Paul Delvaux » et en voyant le résultat : puritanisme américain obligeant, les dames n'étaient que deux et habillées comme au dix-neuvième siècle. Par contre on voyait bien la gare même si les rails semblaient bizarres !

Trois femmes nues attendent sur un banc la nuit dans une gare façon Paul Delvaux

Finalement, je lui ai trouvé un nom à Deep Dream Generator! Je vais l'appeler Mutabor ! Parce que « Adam et Ève et le serpent au paradis vus par René Magritte » eh bien c'est fantastique : on ne voit que des pommes sur le tableau !

Adam and Eve and the snake under an apple tree on Paradise in the way of Magritte

Frères humains et sœurs humaines transformé·e·s en n'importe quel animal ou n'importe quelle plante par un algorithme foireux, pauvres de nous ! « Il n'est pas certain que vous ayez encore un avenir sur cette planète !» semble nous dire la technologie. Alors cher·e·s ami·e·s, résistons ! Vive la sociabilité des ateliers d'écriture, vivent les consignes non krapoviennes et vivent les bières belges !

14 février 2023

Consigne d'écriture 2223-20 du 14 février 2023 : Pif le chien

Pif le chien

 

Ce personnage de bandes dessinées, né en 1948, a sévi auprès de plusieurs générations d’enfants sous forme d’histoires illustrées publiées dans le journal "L'Humanité" puis dans l'hebdomadaire "Vaillant" qui deviendra par la suite "Pif-gadget".

Cela est raconté assez bien ici : https://fr.wikipedia.org/wiki/Pif_le_chien

Nous nous intéressons aujourd’hui aux couvertures du mensuel qui publia les aventures de ce chien anthropomorphe entre 1950 et 1967.

Ce que vit ce toutou d’une famille de prolétaires lambda – César, Agathe, leur fils Doudou, leur chat Hercule, n’est pas très différent de nos propres expériences humaines.

En vous inspirant d’un de ces douze dessins, racontez ou imaginez la même mésaventure survenant à un être humain ou à vous-même.

***

La maison de quartier de Villejean étant fermée en raison des vacances scolaires, cette consigne d’écriture en ligne vaut pour les deux semaines à venir, vous pouvez donc envoyer plusieurs contributions si vous êtes inspiré.e

Un autre sujet d’écriture alternatif : racontez votre rapport actuel avec une bande dessinée lue dans votre enfance.

 Pif 25 couverture GF

 Pif 43 couverture

 Une expérience de grand vent

 Il y a du sport derrière l'écran

 Pif 44 couverture GT

 Pif 47 Couverture GT

 La pratique d'un instrument de musique

 Un après-midi à la patinoire

 Pif 71 couverture GF

 Pif 81 couverture GF

 Une journée rien que pour vous !

 Etes-vous "chat" ou "chien" ?

 Pif 104 couverture GF

 Pif 107 couverture GF

 Une partie de pêche

 Se frotter au danger

 Pif 109 couverture GF

 Pif 111 couverture GF

 Ecologiste ou pas ?

 L'amour des arbres

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14 février 2023

Dans le choeur des anges / Anne J.

Pif 60 couverture GF

Quand j'arriverai à la porte de Saint-Pierre, et après avoir réussi l'examen d'entrée, je serai accueillie par le maître chanteur du chœur des anges, du moins je l'espère. Et ce sévère personnage à la baguette tranchante, me dira :

- Bon, avec la voix que tu as et ton peu de mémoire musicale, je ne te vois pas dans le chœur des anges chanteurs, peut être auras tu plus de chance dans le choeur des anges musiciens ?

- Ah oui , j'adorerais !

- Mais avec quel instrument ?

Et c'est là que je me demanderai ce que j'ai fait avec la pratique de la musique et des instruments de musique dans ma longue vie. Je crois que mon premier instrument était un harmonica sans dièse gagné dans une kermesse et dont je tirais des sons stridents en soufflant et en inspirant à fond.

Je n'ai pas fait partie des cohortes d'enfant qui ont appris le solfège sur une flûte à bec, souvent bon marché et donc fausse, en classe de 6ème, cette pratique ayant à tout jamais dégoûte 90 % des enfants de pratiquer les instruments à vent : ça bavait, ça faisait un son moche et ce n'était le choix de personne.

Un peu plus tard, j'ai acheté ma première guitare, c'était l'époque Joan Baez, Bob Dylan et autre Graeme Allwright et avoir une guitare dans un groupe vous assurait un statut et une place : tout le monde savait les dix premières mesures de « Jeux interdits » et la « Ballade de Sacco et Vanzetti ».


 

Ca donnait une contenance de tenir une guitare et d'y gratter quelques arpèges.

Je n'avais pas de voix, pas d'audace et pas beaucoup de répertoire et donc je me suis essayée ensuite quelques années à la guitare classique ; ce fut un peu mieux et je m'en sortais assez bien pour présenter quelques morceaux connus mais ca n’avait pas vraiment le même coté convivial que de faire chanter les autres.

Et c'est là que j'ai découvert que je n'avais aucune mémoire musicale et que contrairement à bien d'autres il me fallait absolument la partition écrite.

Bien des années plus tard, je suis allée en voyage à Prague, à une époque où il fallait, avant de repasser la frontière, avoir dépensé l'argent que l'on avait changé à l'arrivée : il était interdit de sortir la monnaie du pays et s'il en restait on devait en faire cadeau aux douaniers. Pas question ! Pour écouler mon argent, j'ai donc acheté un violon, sur un coup de tête et parce que j’adore le son de cet instrument.

Pif 44 couverture GTEn rentrant j'ai pris des cours de violon avec trois professeurs successifs qui avaient d'ailleurs des exigences différentes : çà a été difficile car le violon c’est longtemps ingrat. En violon folk on joue le plus souvent sans partition et très vite et en violon classique, c'est beau quand tu es violon solo, ce qui était tout à fait hors de ma portée, sinon il faut jouer avec d'autres, ce que je regrette de ne pas avoir fait, ou presque pas . J’aurais aimé je crois jouer dans un ensemble parce que c'est beau des violons qui jouent ensemble

- Je vois , a fait le maître des anges , vous aimeriez intégrer le groupe des anges violonistes ?

- Euh ? Vous croyez ?

J'ai donc fait 10 ou 15 ans de violon sans faire vraiment de progrès mais avec un certain plaisir jusqu'à ce que je tombe sur une petite annonce du journal « Le Trégor » un matin de juillet : «  Stage de piano, une semaine pour découvrir en cinq matinées comment jouer du piano et se faire plaisir rapidement ; aucune connaissance préalable requise, ouvert à tous ».

J'aime ce genre de défis et je suis donc allée passer cinq matinées chez Danièle. J'ai beaucoup aimé ça et je me suis inscrite pour un cours hebdomadaire afin d'apprendre le piano.
C'est bien plus facile que le violon, beaucoup plus gratifiant et j'arrive un peu à jouer sans partition. Je continue à m'amuser beaucoup avec mon nouveau professeur à une seule condition : qu'on ne me demande pas de jouer devant un public ! J'ai passé l'age des auditions en robe de velours devant un public captif et je n'ai jamais eu celui de la demoiselle qui joue devant des vieilles dames buvant du thé ou du brandy avec un charmant jeune homme qui tourne les pages !

- On fait quoi dans le choeur des anges musiciens ?

- On chante pour la gloire de Dieu.

- Et Il vous écoute ?

- Sans doute pas car Il a bien d'autres choses à faire ! Alors le poste vous intéresse ?

- Au piano ? On peut chanter « Les copains d'abord »  ou «  Halleluiah de Leonard Cohen ? C'est un de mes morceaux préférés ou seulement « Les Anges dans nos campagnes » ?

- Faut voir !

- Et tout compte fait, j'essayerais bien la clarinette aussi ! C'est possible ? J'aurai l'éternité pour apprendre et ca, ça me va !

Anne J

14 février 2023

Avec mon harmonica (air connu) / Jean-Paul

AEV 2223-20 JK - harmonica

Je ne suis pas ici pour raconter ma vie... mais l’autre jour un monsieur très sympathique qui m’avait vu jouer de la musique en public m’a téléphoné et m’a demandé si je donnais des cours d’harmonica.

J’ai été désolé de le décevoir mais je crois que j’aurais été bien en peine de le satisfaire. « Science sans conscience n’est que ruine de l’âme », dit le proverbe rabelaisien. Tout comme monsieur Jourdain avec sa prose, je joue de l’harmonica – et aussi de la guitare – sans trop bien savoir ce que je fais ou comment je fais. Otto Didakt pourrait être un autre de mes pseudonymes ! Et on fait des tas de choses sans prendre le temps de lire le mode d’emploi. On vit dans l’à peu près mais on n’est pas tout seul comme ça ! Alors, expliquer aux autres !

Au Québec un harmonica est appelé un ruine-babines. Dieu seul sait, avec ce qu’on se prend dans les gencives au long d’une vie, dans quel état nous finirons ! Peut-être serons nous tellement en ruines qu’on nous appellera Mathurin Pompeï – j’écris ça parce le mardi, c’est le jour des épinards, chez nous ! -.

Mon premier harmonica, offert par mon grand-père, était du même modèle que celui ci-contre. Je l’ai perdu dans mes déménagements mais j’ai hérité d’un modèle identique après le décès de la marraine de Marina B. Quand mon épouse préférée est allée vider la maison avec sa mère et sa tante, elle m’a ramené les deux harmonicas de l’oncle Serge.

Pif 44 couverture GT

Intéressant. Deux modèle désormais vintage avec une sonorité différente de ce que donnent les excellents « Marine Band » de M. Hohner dont j’ai toute une collection (il en faut un par tonalité !). J’ai appris aujourd’hui que l’Echo harp est un modèle « trémolo » en ré et l’autre est un "Comet" en do. Je ne peux malheureusement pas les utiliser pour des raisons... d’hygiène – où y’a d’l’hygiène, y’a pas d’plaisir ! -. L’oncle Serge avait un vilain défaut : il fumait. Les harmonicas ont gardé l’odeur voire le goût du tabac !

Du coup ils dorment dans un de mes tiroirs en compagnie d’un bootleneck, d’un vieux micro et d’un jeu de cordes pour violon.

L’illustration de José Cabrero Arnal m’a donné une idée intéressante : et si je les faisais tremper dans un bain d’eau savonneuse pour faire partir l’odeur ? Je pourrais moi aussi faire sortir des bulles de savon de l’instrument !

Sûr qu’après ce traitement la rouille ne dormirait pas ! Et ça m’interroge. A force de voir Neil Young tremper les siens dans un seau d’eau avant d’en jouer dans la partie acoustique des ses concerts, je me dis qu’il doit claquer une fortune chez M. Hohner ! Bon, lui, OK, il a les moyens ! En plus à 77 piges il n’a pas encore pris sa retraite !

J’ai deux façons de terminer ce billet presque complet sur « ma vie chez les harmonicas ». La première c’est de me souvenir du dernier concert, de Neil Young justement, que j’ai regardé sur Internet. Il y a un très chouette morceau sur la fin où ce n’est pas lui qui joue du ruine-babines mais deux harmonicistes qu’il ne présente même pas au public et dont l’un joue… d’un Echo harp !

 C'est à 30'30" :

La deuxième c’est cette vidéo vue après lecture d’un billet d’Adrienne dans lequel un musicien techno reprend « Oh Susanna », le premier morceau de folk américain que j’ai joué sur mon premier harmonica ! 

14 février 2023

R comme rab / Adrienne

Au début des années 2000, Madame avait pris un abonnement au magazine Phosphore, histoire d’avoir des « documents authentiques » sur des sujets variés qui intéressent les jeunes de 16-18 ans.

En même temps, ça permettait d’illustrer à quel point la liste des mots argotiques et familiers à connaître n’était pas un travail superflu.

C’est ainsi qu’elle-même y découvrait chaque mois des mots « nouveaux » et parfois ils lui posaient problème.

– Les garçons ne refusent jamais du rab de dessert, disait une jeune fille.

Du rab?

Madame utilisait fréquemment le dictionnaire de Cobra le Cynique mais même lui ne mentionnait pas ce mot.

Le contexte, bien sûr, aidait à deviner que ça voulait dire quelque chose comme ‘un petit supplément’ mais à l’époque aucune source ne permettait de le vérifier et d’en être sûre.

Aujourd’hui le mot est sur wikisaitout et qui sait, peut-être même dans quelques dictionnaires 😉

C’est ce mot-là auquel elle a pensé tout de suite en voyant l’illustration proposée par Joe Krapov dans sa dernière consigne: avoir du rab, avoir du temps en plus, rajouter des jours au calendrier et fêter la Saint-Pif ;-)

14 février 2023

N comme No way / Adrienne

Un des anciens élèves de Madame est féru de pêche : sur son profil fb, il pose fièrement – exactement comme le type sur la photo ci-dessous – avec des carpes géantes ou autres poissons d’eau douce.

Il y a des étangs qui semblent faits pour ça et les mecs jouent à qui a le plus grand.

Ce qui leur vaut des tas de ‘like’ et de commentaires admiratifs.

– Suis-je donc la seule, se demande chaque fois Madame, à trouver ça horrible, à n’y trouver aucun sens – que font-ils de ces pôv’ bêtes après les avoir pesées et mesurées ? – à se demander s’ils n’ont vraiment rien de mieux à faire et pourquoi ils en retirent tant de fierté.

Elle a enfin la réponse : non, elle n’est pas la seule.

Dans un article fort humoristique, une journaliste hollandaise explique tout ce qu’il y a de pire sur les profils masculins des sites de rencontre.

Comme couper la photo de profil au niveau des sourcils, pour cacher qu’on est chauve.
Se prendre en photo aux toilettes ou dans une chambre encombrée de linge sale.
Ou à côté d’une Porsche.
Qui appartient sans doute à un ami.

Et le pire du pire, c’est le mec qui pose avec un poisson mort ;-)

***

C’est ce qui est bien expliqué dans cet article, d’où vient la photo ci-dessous, et la consigne m’y a tout de suite fait penser. L’article est pour abonnés mais je peux l’envoyer à qui le désire.

14 février 2023

Paysages de tempête / Laura

Pif 25 couverture GF

Lors de la grande tempête de 1999, nous étions sur la route qui nous ramenait du Nord-Est  vers notre Sud-Ouest. Nous étions presque à un tiers de notre route (neuf heures) quand j'ai eu ma grand-mère au téléphone : elle était sans chauffage et il faisait seulement quatorze degrés chez elle. Mon mari a fait demi-tour pour lui trouver une solution ; je ne me souviens plus laquelle (pour répondre à la question perfide qu'on m'a posée) mais ma grand-mère avait chaud quand nous sommes repartis.

Dans notre Sud-Ouest, un jour le ciel s'est obscurci et la tempête de sable s'est levée. Mon mari était en déplacement professionnel. Peut-être mon beau-fils était là ? Les débris d'objets emportés par le vent s'amoncelaient partout. J'ai tenté de retenir la tente dressée dans le jardin, surtout les parties métalliques pour qu'elles ne blessent personne ou n'abîment quelque chose chez les voisins. Mais la tempête redoublait, sifflait sa rage , menaçait de me prendre pour victime et je me repliai dans notre villa.

A Casablanca, alors que nous étions dans une situation précaire, mon mari dut s'absenter pour tenter de sauver notre situation. La tempête démembrait tout ce qui dépassait des appartements et était mal fixé. Je craignais pour notre parasol de terrasse alors que les éléments redoublaient de rage. Il semblait que les lions de l'Atlas rugissaient pour nous faire quitter le Maroc.

A Casablanca encore, nous avons vécu aussi une tempête de sable venu du désert. Rien ne bougeait et n'apaisait ce four à quarante-quatre degrés.

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