L’agent de l’amour / Liliane B.
Quel est l’agent de l’amour ? De l’amourette même ? Un ange peut-être ? Un seul ? Non. Il est possible que les anges voyagent incognito dans des autocars, qu’ils aillent au bal ou envahissent les bars.
Vous trouvez ça bizarre ? Vous auriez préféré qu’ils se trouvent dans les bois, là où fleurit la bruyère ? Vous ne les imaginez pas s’invitant à un buffet mondain ou sur les terrasses des buildings ? Vous êtes de pauvres petits canards qui pleurent de chagrin à l’écoute d’une chanson réaliste et chouette ! Eh bien non, les anges sont dans la cité, chers clients de la presse du cœur qui, vous le savez, n’est qu’un commerce pour vous vendre une couchette sans distinction de douceur ni d’émotion.
Une fille flirte sur le gazon tout en donnant du grain aux grenouilles et du gruyère au hasard à quelques hommes qui passent. Elle vient dans ce jardin chaque jour, il est le lieu où l’on voit le mieux la clarté de la lune, le soir venu.
Dans le silence on peut entendre un air de luth. C’est le maire de la ville qui a de bien curieuses manières. Ce Monsieur joue des morceaux la nuit pour les oiseaux à qui il donne du pain sur son passage. C’est un poète qui cueille des primevères quand il est en promenade le samedi juste devant le logement du sous-préfet où il y a des statues visitées par les touristes. Il valse au milieu de cette verdure, dans sa ville. Il n’en croit pas ses yeux.
Quel est l’agent de l’amour ? Saurons-nous jamais ?