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L'Atelier d'écriture de Villejean

4 octobre 2022

Deux lettres de Provence / Jean-Paul

2223-04 Consigne Facteur filigrane

Comme elle sent bon, cette lettre, le thym et la farigoulette, la lavande et le romarin ! Elle donne envie de sourire, d'être toujours de bonne humeur. Cela me fait le cœur joyeux de lui venir en aide, de la transporter à son destinataire, en toute simplicité.

Bienvenue à toi, lettre de Provence, pays qui dans mon souvenir est naturel et généreux ! Les passionnés de la pétanque profitent du soleil et de l'ombre sous les platanes de la place, l’Issole, rivière indolente, coule sous le pont de Cabasse dans la direction du lac de Carcès. Il y a la magie des vacances, l'apéro dont on profite sur la petite place près de la fontaine, le restaurant de Jean Dotto. Il y a la créativité rythmique des cigales heureuses tout l'été de faire partie de l'élitre et qui ne réalisent pas qu'il vaudrait mieux parfois suivre les conseils de Dame fourmi. Il y a ce vin, divine surprise pour le palais, du domaine de Campdumy cultivé par la famille de Bernard Gavoty.

Merci, merci à toi, la lettre de Provence, d'avoir créé en moi ce moment de rêverie spontanée mais le service public m'appelle. J'ai pris la liberté de m'arrêter un temps mais je reprends mes esprits. Je m'en voudrais beaucoup de ne pas transmettre l'invitation que tu contiens : un séjour d’un week-end pour vivre une aventure dans la garrigue et concrétiser une liaison naissante ? Répondra-t-il positivement à Dulcinée ? Ou bien se fait-elle des idées ? Je ne saurai jamais, hélas, ce qu'elle lui propose, la petite ! C'est quoi son nom à l'expéditrice ? Mireille Mathieu. Et lui, le destinataire ? Yves Mourousi.

Oh merci les amoureux de m'avoir mis des petites fleurs bleues dans la tête et rappelé l'accent qu'on attrape en naissant du côté de Marseille !

 

*** 

 

2223-04 Consigne Facteur filigrane bleu vert

Comme elle sent bon, cette lettre ! Un parfum de femme, une lettre d'amoureuse à tous les coups !

Et il dit quoi, le cachet de la poste faisant foi ? Arles ! L’Arlésienne de Bizet qui fait suite à celle d'Alphonse Daudet ! C’est dans quoi, déjà, ce récit ? Dans les "Lettres de mon moulin", peut-être. Je ne sais même plus de quoi ça parle, cette nouvelle, tellement l'autre œuvre de Bizet, Carmen d'après Mérimée, a joué au cannibale avec ce morceau-là ! Un monument chasse l’autre ! On a tous en tête le toréador Escamillo, le regard noir du taureau qui craint un peu pour ses oreilles et pour sa queue, la passion de Don José pour la belle cigarière. En même temps, tout ce brouhaha musical, tout cet opéra en fanfare, ce meurtre au milieu de la foule pendant la corrida, c'est juste une histoire de cœur un peu vide, des mots de folie d'un brigadier génialement doué pour le sabotage ! Parce que Mickaëla, là quand même ! Il faut vraiment ne penser à rien et ne rien avoir dans la coucourde pour ne pas voir qu'il est là, le bonheur ! Bonheur certes tranquille, pépère, peinard où les jours se suivent et se ressemblent comme marabout et bout de ficelle mais quoi ? T'es pas Don Quichotte, Don José ! Tu n'es pas le « Fool on the hill » et ton enfermement quasi insulaire dans le mirador du désir jaloux, si tu savais comme il nous escagasse les esgourdes ! D'ailleurs c'est simple : moi, le dernier acte de cet opéra, je ne l'écoute jamais tellement ça me les brise menu, ta bêtise !

Et puisque c'est comme ça, la lettre de Mickaëla, je me la garde ! Je ne la dépose pas dans ta boîte aux lettres ! Et puis même je vais lui répondre à l'Arlésienne, lui dire que tu ne vaux pas un clou, que tu as des aventures avec des messieurs, que tu as entrepris une psychanalyse même et que si elle veut faire un petit transfert tranquille je suis là, moi !

En reprenant ma tournée je la lui écris dans ma tête la lettre que je lui ferai ce soir.

"Ma chère petite Mireille

Patati patata... Don José... Bouh le vilain... Patati patata…

Et je signe, très affectueusement :

Joe Nistarque 


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4 octobre 2022

Le Facteur amoureux / Josiane

Ne penser à rien, faire le vide, continuer à marcher, oublier le brouhaha de son coeur quand le regard amoureux de la belle insulaire se posait sur lui.

2223-04 Josiane - carte Van GoghIl marchait plongé dans ses pensées sur les trottoirs de sa bonne ville d’Arles, déposant rigoureusement les missives à lui confiées, porteuses des mots enflammés de la passion ou des mots cannibales des tristes nouvelles. Il fendait la foule, fermant l’oreille aux bruits de la rue. Seul l’habitait le sabotage en règle par elle orchestré.

Marcher, arpenter les rues de la ville, c’est le travail du facteur. Porter les lettres d’amour aussi, lui qui en était si cruellement privé. La belle avait en quelques mots jeté en lui le grand désordre. Un monument de tristesse l’habitait. Il se surprenait parfois à chercher son parfum sur une enveloppe, sur une passante et il y avait
toujours cette fanfare dans sa tête, ce tumulte sans cesse renouvelé.

Etaient ce les battements de son coeur ? Il lui semblait que jamais il ne retrouverait la paix, perché sur le mirador qui l’isolait du monde.

***

2223-04 Consigne Facteur filigrane supernova

Ce joyeux sourire, il le devait à son week-end en baie de Somme.

Le souvenir de ce moment privilégié lui revenait alors qu’il  arpentait comme chaque jour les rues de la ville, distribuant dans la bonne humeur les missives qui lui était confiées.

Il venait de réaliser son rêve, profiter d’un week-end ensoleillé pour saluer Dame Nature en toute simplicité, accompagné de son ami le plus cher. Ce séjour avait commencé sous les meilleurs auspices, la magie de l’océan, synonyme d’aventure, remplissait à chaque fois son être d’un bonheur qu’il n’aurait su transcrire.

Ce n’était pas un esprit passionné, il suffisait d’un rien pour le mettre en joie. Profiter, vivre, concrétiser, voilà qui lui parlait. Avec cela, généreux, éprit de liberté, aimant le naturel. Il était l’ami idéal, toujours de bon conseil, spontané et sans surprises. Il aimait par dessus tout son métier. Il aimait à rêver la vie contenue dans les lettres qu’il transportait. Il se surprenait parfois à humer le parfum d’une enveloppe empreinte de créativité.

L’une d’entre-elles lui avait donné l’idée de ce séjour en Baie de Somme. C’était une simple carte postale, l’écriture lui semblait enthousiaste plus que les mots eux-mêmes. Le paysage était un peu triste mais c’était ce qui l’avait attiré, autant que le dessin à la plume et le mot « Bienvenue » inscrit sur la courbe d’une vague.

27 septembre 2022

Consigne d'écriture 2223-03 du 27 septembre 2021 : Odyssée

Odyssée

 

Voici vingt cartes extraites d'un jeu appelé Dixit dans sa déclinaison dénommée "Odyssée". Vous en choisisssez une, deux ou trois ou plus et vous écrivez un, deux ou trois textes à partir d'elles. Vous pouvez donc illustrer votre texte par trois images, deux ou une et, dans ce dernier cas, écrire plusieurs textes.

Cliquez sur les images pour les agrandir

 Dixit O 01

 Dixit O 02

 Dixit O 03

 Dixit O 04

 Dixit O 05

 Dixit O 06

 Dixit O 07

 Dixit O 08

 Dixit O 09

 Dixit O 10

 Dixit O 11

 Dixit O 12

 Dixit O 13

 Dixit O 15

 Dixit O 14

 Dixit O 16

 Dixit O 18

 Dixit O 17

 Dixit O 19

 Dixit O 20

 

27 septembre 2022

Le Géant / Anne J.

Dixit O 17Le géant poussa la porte grinçante de la petite maison et entra.

Devant la table, tout au fond de la pièce, se tenait une frêle jeune femme avec de longs cheveux noirs et une robe rose façon kimono. Ce n’est pas ainsi qu’il imaginait une cartomancienne mais ce devait être elle, car elle était penchée sur des cartes étalées sur la table et semblait perdue dans ses pensées.

- Je vous attendais, dit-elle, entrez et asseyez vous !

- Mais je ne savais pas moi-même que je viendrais !

- Aucune importance, les cartes me l’ont dit. Vous voulez connaître votre destin, c’est cela ?

Le géant fit non de la tête mais la belle chinoise n’avait d’yeux que pour ses cartes et notre timide n’osa pas la démentir

Dixit O 09- Eh bien demain soir vous irez au casino ; il faudra vous habiller un peu sinon on ne vous laissera pas entrer : costume, cravate et chapeau mou sont de rigueur . Vous verrez, tous les humains sont ainsi vêtus.

- Je sais, j’y suis allé hier, la plupart portaient au pied un lourd boulet accroché à la cheville avec une chaîne.

- Normal, si on y va plus de trois fois par mois, on devient ce qu’on appelle « un accro au jeu », on est enchaîné. Vous irez à la table de la roulette et vous miserez tous vos souvenirs et même votre vie.

- Et qu’est-ce que je peux gagner ?

- Ce sera le Pouvoir, l’Amour, la Mort ou la Chance.

- Comme dans la vraie vie donc ! Et vos cartes disent quoi ?

- Elles ne disent rien de précis.

Dixit O 01- Ben c’est de l’arnaque, votre truc ! Et puis je ne suis pas venu pour cela. Je cherche les clefs de ma caverne, je les ai fait tomber hier soir en secouant mon pantalon par la fenêtre et je ne les retrouve pas.

 La femme ouvrit le tiroir devant elle et posa sur la table une loupe géante en métal doré. Elle regarda attentivement au travers et sembla ne rien voir pendant un long moment.

- Ah je vois ! Dans le nid de la pie au sommet de l’arbre de gauche. Bon courage pour aller la récupérer !

- J’ai une dernière requête.

- Dites toujours.

- Que dois-je faire pour qu’ on cesse de chanter dans mon dos « Gare au gorille » ?

Dixit O 05- Je vous conseille le festival Brassens à Rennes, on y rencontre des fous qui chantent du Brassens pendant tout un week-end, d’ailleurs ils sont visibles, là sous ma loupe magique. Je vois un gars qui s’égosille avec une guitare. Vous devriez enrichir votre répertoire et vous pourriez clouer le bec à ceux qui vous harcèlent en chantant « Fernande » ou « Margot » ou « Dans l’eau de la claire Fontaine ».

Le géant sortit deux pièces et s’en alla en sifflotant « La Cane de Jeanne ». C’était la seule qu’il savait par cœur. 

27 septembre 2022

Au bal masqué ohé ohé / Marie-Thé

Dixit O 22

Au bal masqué ohé ohé, le lutin a dérobé quelques couvre-chefs.

Capucine, la fille qui se prend pour une fée est bien dépitée. L’absence de son joli chapeau pointu plein d’étoiles fait place à des cheveux blonds, rebelles, sur lesquels elle avait laissé quelques bigoudis.

Furieuse, rouge comme un coquelicot au milieu d’un champ de blé, elle devient le point de mire de la salle et cherche désespérément des toilettes pour se refaire une beauté.

- Pas grave ! lui dit Mathurin en passant près d’elle. Moi on m’a volé mon chapeau-melon et regarde, je n’ai plus un poil sur le caillou. Nous allons les retrouver, nos couvre-chefs !

Un petit homme élégant avec une queue de pie ronchonne en faisant les cent pas.

- Moi, on m’a pris mon haut de forme ! Avec lui, je gagne au moins 20 centimètres !

- Moi on m’a chipé ma cagoule de monstre ! s’écrie un autre en montrant les dents. Je me vengerai !

- Et moi mon bonnet d’âne, celui que j’ai gardé en quittant l’école pour que cet objet honteux disparaisse définitivement !

Dans la salle de bal, tout le monde s’est arrêté de danser. Les discussions vont bon train. Tout à coup, le lutin surgit en lançant les chapeaux volés. Les rires se déclenchent.

Toute la salle se met à chanter : 

« Au bal masqué ohé ohé
devinez devinez qui je suis,
aujourd’hui tout est permis
au bal masqué ohé ohé… »

 

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27 septembre 2022

Point d'interrogation ? / Jean-Paul

Est-ce qu'on sait à partir de quand on arrête de se poser des questions? Ou de poser des questions ? Est-ce que c'est quand on est devenu un vieux con, qu'on est pétri de certitudes, qu'on a tout vu, tout lu, tout bu et qu'on sait... qu'on ne sait jamais ?

Dixit O 13

Pourquoi sait-on d'avance que la page ne restera pas blanche ce mardi soir ? Et surtout, comment formuler ses interrogations si on en a encore ? Vous avez vu la gueule du clavier, ces touches toutes marquées de ce symbole commun à tous les alphabets ou presque, le point d’interrogation ?

Et c'est là où le projet d'écrire un texte dont toutes les phrases seraient des questions se casse la figure ! On le constate avec l'air penaud du gars qui n'a jamais pensé à ça avant aujourd'hui : le point-virgule, la virgule, les deux points, d'où ça nous vient, tout ça ? Est-ce ça existait déjà dans le latin de Cicéron ou dans le grec de Vatfèrvwar Chélé ?

Le point d'interrogation, le point d’exclamation, les trois points, y en avait-il dans les hiéroglyphes égyptiens ?

Y a-t-il des idéogrammes idoines en japonais ou en chinois pour signifier qu'on est dans le département du doute,25, ou dans un état proche de l'éclat de rire ou de la vivacité ?

Ça racontait quoi l'écriture cunéiforme? S'interrogeaient-ils sur l'avenir, les gens à l'oreille en coin?

À vrai dire, la page blanche sur l'image va peut-être rester vierge. Appuyer sur une touche de la machine déclenche peut-être tout à fait autre chose que l'impression d'un signe !
Peut-être même une réponse du style « Longtemps je me suis couché de bonne heure » ? Un appel téléphonique à l'émission de Noëlle Bréham « Les Petits bateaux « sur France-Inter ? La création d'une page Wikipédia intitulé « L’arrobase à travers les âges ? L'explosion d'une centrale nucléaire quelque part sur le globe terrestre ?

Alors c'est bien beau de poser des questions ; il reste toujours celle-ci à la fin du compte : où conduisent tous ces tuyaux ?En quoi ça intéresse qui, nos données métaphysiques personnelles ? S'il y a un maître des horloges, qui est le maître de la machine ?

Allez, je veux savoir : je tape les touches qui correspondent à AZERTY.

Rien ne s'imprime. Une voix venue des profondeurs retentit alors et m’aboie dessus : « Votre mot de passe est invalide ! ».

27 septembre 2022

Les Voisins d'Isaure / Jean-Paul

Isaure 1024 2022 11 22 Voie lactée

- Mais qu'est-ce qu'elle a de plus que nous ? Elle est plate ! Plate de partout ! Sans aspérités, sans relief. Elle pose devant ce fond gris vert, à côté de son rideau, comme si elle était déjà sûre de terminer sa vie dans un musée !

- En même temps, dit le perroquet, elle n'a pas grand chose pour elle ! Une robe rose des jours de fête, des fleurs dans les cheveux ,un petit air godiche comme on n’en fait plus ! Il n'y a pas grand monde à flasher sur elle ni même à s'arrêter plus de trois 3 minutes devant son selfie de première de la classe qui ne fera jamais ni de bêtises ni de grimaces. Isaure Chassériau ! Quel blase elle porte en plus !

- Remarque, nous non plus on n'attire pas la foule. Pourtant un tableau en relief, avec la communication possible entre les deux mondes, le réel et l'imaginaire, le possible et l'impossible, ça devrait bousculer un peu, non ?

Dixit O 12

- Tu penses que trop de surréalisme tue le surréalisme ?

- Non je pense que ce serait mieux s'il y avait un asticot au bout de l’hameçon !

- Et un poisson qui tourne autour dans le verre ?


- Ah non je suis contre la maltraitance envers les animaux !


- Ah bon ? Et l'asticot, transpercé de part en part, c'est quoi. Juste un concept ?


- Un point pour toi, l’ara !


- À causer de la voisine, des autres tordus qui essayent d'épater la galerie et, en général, de l'art contemporain ou pas, on ne voit pas le temps passer ! C'est déjà l'heure de la fermeture du musée. Tu vas pouvoir poser ta canne et aller t'allonger, le pirate !


- Pas trop tôt ! Je commençais à avoir des fourmis dans ma jambe de bois !


- Et puis tu sais on va vers le mieux ! Parait qu'avec la crise de l'énergie ils vont fermer les musées plus tôt ou un jour de plus par semaine.


- Je suis assez preneur, je dois dire !


- Par contre pour ce qui est de prendre ta retraite, faudra attendre un peu plus. Ils vont reculer l'âge de départ possible pour cela.


- Ça m'arrange aussi ! Je ne suis pas pressé d'aller me faire remiser à la cave, d'être mis en réserve de l'arrêt du public !

- En tout cas ne t'inquiète pas, Papy Rackham! S'il y en a qui veulent vraiment t’embêter je te défendrai du mieux que je peux ! Je leur volerai dans les plumes à ces australopinacothèques !

27 septembre 2022

Rêve de voyage / Adrienne

« Le premier hôtel de l’espace ouvrira en 2025 », lit l’Adrienne éberluée, vendredi dernier.

Pour elle, ces choses-là en sont restées au stade « On a marché sur la lune » avec Tintin (en couleurs) puis avec Armstrong (en noir et blanc) et à part ça elle aimerait bien qu’on laisse la lune tranquille.

Elle ne veut pas savoir ce que ça va coûter – en dollars et en énergie – ni quelle sorte de gens se sont mis sur la liste pour ce tourisme spatial.

Elle ne veut pas savoir à quoi ils s’y occuperont pour passer le temps – lire des Tintin ? regarder A space odyssey ? – s’il y aura une piscine, un jacuzzi, un restaurant gastronomique…

Elle veut continuer à rêver aux étoiles et se dire que le petit Prince est là, quelque part.  

27 septembre 2022

Meriem / Maryvonne

Dixit O 08

Alors que l'âge lui faisait courber le dos Meriem se voyait en ombre chinoise à côté d'elle et dans ce songe étrange elle sifflotait : « Le temps, le temps, le temps et rien d'autre, le tien, le mien celui qu'on veut nôtre ». Sa mémoire chancelante avait par contre oublié quel chanteur lançait cette ritournelle. L'ombre chinoise, comme sortie d'une lampe magique, était visiblement porteuse d'un heureux événement et la coiffure en queue de cheval haute semblait datée des années 70.

Cette silhouette, c'était peut-être une réminiscence de son passé du temps où elle avait le teint de rose et son avenir de mère droit devant elle. Le passé, l'avenir étaient comme un festival de montres qui trottent. Les tic tac, tic tac dans sa tête disaient :

« Tu vieillis, tic et dans tes deux sacs, tac, tu portes ton avenir, tic et tes souvenirs en vrac, tac. Ton regard est nostalgique, tic mais tu ne baisses pas les bras, tac. . Les montres et horloges qui pendent sur ta tête ne sont pas molles comme celles de Salvador Dali. Elles sont fermes, avec la volonté d'avancer, quoi qu'il en coûte, comme dit un jeune président français.

Les aiguilles ne lâchent pas l'affaire et tricotent encore de bons moments. Mais le bât blesse un peu, il appuie sur ses épaules fatiguées et ce voile que des scélérats t'obligent à porter n'augure rien de bon. Pourtant toutes les roses de ton pays ne courbent pas la tête. Voilà qu'une jeunesse se dresse courageuse et téméraire, s'arrache le voile et piétine le bât. C'est pour cela sans doute que ton esprit revoit la jeune femme que tu as a été, chantant, tête nue, puisque que tu en avais le droit ».

Pourvu que les montres se mettent à l'heure de la modernité, de l'ouverture et surtout de l'égalité femme/homme ! Pour ma part c'est le vœu que je fais, pour vous, toutes les femmes du monde.

27 septembre 2022

Numéro 3 rue des Artistes / Josiane

Dixit O 02C’était un jour comme les autres, le soleil avait remplacé la pluie qui n’avait pas cessé de tomber pendant la nuit. A bien observer le jardin, la pelouse avait reverdi après un été particulièrement sec. Les oiseaux pépiaient à bec déployé.

Je m’étais levé tôt ce matin là, contrairement à mon habitude. La cuisine sentait le café fraîchement passé et l’odeur du pain grillé flottait encore dans la maisonnée. Le bruit de la pluie sur les carreaux avait fait place au silence ponctué seulement par le vol d’un insecte attiré par la confiture du petit déjeuner.

Dixit O 15

J’avais mal dormi, mon sommeil avait été ponctué de cauchemars qui me revenaient par bribes : un fantôme gigantesque foulant le désert, à la main marteau et coins brandis au bout de quatre bras vengeurs, un loup marionnettiste manipulant un agneau ceint d’une ceinture d’explosifs... J’avais trop écouté les informations et l’actualité me poursuivait jusque dans mes rêves.

Dixit O 14Que n’aurais-je donné pour que mes nuits me transportent en un lieu où des roses multicolores s’épanouiraient sur une tige gracile sans épines, où les horloges seraient à jamais arrêtées, où les clefs ouvriraient sur des châteaux où tout ne serait que fêtes et contes de fées !

Dixit O 04Pour l’instant il n’était plus question de rêver, la journée qui m’attendait n’était pas des plus réjouissantes. La galerie allait bientôt ouvrir et ma journée commencer. Les dernières oeuvres exposées étaient certes fort colorées, plutôt gaies, à l’opposé de leur auteur qui devait ce jour nous honorer de sa présence : un grand échalas échevelé, imbu de sa personne, ne cessant de parler de lui et de son œuvre, comme s’il eût été le seul, l’unique peintre de sa génération. Avec cela il était triste comme le glas, ennuyeux à mourir, à croire qu’il n’était pas l’auteur de ses tableaux. Il arborait généralement un costume noir qui le faisait ressembler à une ombre.

Je ne me précipitais donc pas pour gagner le numéro trois de la rue des Artistes. Je n’étais guère pressée de retrouver cet individu qui n’honorait pas ses pairs.

Alors que je marchais vers cette journée prétendument désastreuse, un attroupement attira mon attention. Retarder le plus possible l’ouverture du numéro trois fut sans doute l’activateur de ma curiosité. Je fendis maladroitement la foule compressée et ce que je vis me laissa interdite. Il gisait sur la chaussée, la tête baignant dans une flaque noirâtre, les yeux grands ouverts sur le ciel bleu.

Au premier regard je l’avais reconnu.

Je fendis à nouveau la foule et me dirigeai vers la galerie. Mes pensées avaient-elles un lien quelconque avec ce qui venait de se produire? Certainement non, mais ma journée fut encore plus désastreuse que je ne l’avais prévu.

Les tableaux me chuchotaient des reproches, les couleurs agressaient mes pupilles . La journée s’étira sans fin comme un long voile de deuil.

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