Tant de... / La Licorne
Tant d'obstacles rencontrés
Tant d'avenir barré
Tant d'occasions manquées
Tant de désirs refoulés
Tant d'interdits inculqués
Tant d'idées abandonnées
Tant d'élans arrêtés
Tant de rêves effacés
Tant de voyages annulés
Tant d'impossibilités
Tant de tâches imposées
Tant de règles insensées
Tant d'absurdité conditionnée
Tant de croyances infondées
Tant d'excuses ressassées
Tant de possibilités envolées
Tant de joies contrariées
Tant de fêtes reportées
Tant d'heures désenchantées
Tant d'attentes prolongées
Tant d'angoisses répétées
Tant de masques portés
Tant de rires étouffés
Tant de mots censurés
Tant de prétextes invoqués
Tant de peurs inventées
Tant d'existences dérobées
Tant d'années sans liberté
Tant d'amours prohibées
Tant de gestes avortés
Tant de sentiments cachés
Tant d'amitiés inexplorées
Tant de créations empêchées
Tant d'aventures confisquées
Tant d'enthousiasmes effilochés
Tant de temps gâché
Tant de choses inachevées
Tant de vie gaspillée
Tant de barrières imaginées
Sans jamais penser
A faire un "pas de côté" !
A la fin de l’envol qui touche le pactole ? / Jean-Paul
Quand les poules auront des dents
Je cesserai d’avoir l’air de regarder le monde comme un couteau trouvé
Quand passeront les cigognes
J’arrêterai de penser à la matriochka qui porte dans son ventre son bébé tout pareil
Quand nous chanterons le temps des cerises
Je me souviendrai de la Commune de Paris plutôt que de Napoléon
Quand refleuriront les lilas blancs
J’irai admirer les glycines mauves dans les rues de Rennes
Quand tous les soldats reviendront de guerre
Je n’en reviendrai pas si ça arrive un jour
Quand ils seront morts les poètes
Leurs chansons continueront de courir les rues
Quand s’en reviendra l’homme qu’attendait Barbara
Je n’en saurai pas plus sur son compte si ce n’est qu’il arrivera trop tard
Quand on n’aura plus que l’amour
Quand les hommes vivront d’amour
Quand la musique sera bonne
Quand on arrivera en ville
La Madelon viendra pour nous servir à boire
Quand trois poules iront aux champs
Qu’elles se méfient du renard :
Lui ne vit d’amour que de la bonne chère
Quand on se promènera au bord de l’eau
Quel renouveau ! Tout sera beau !
Quand la mer montera
Pas question d’avoir honte de penser à Fernande
Quand les andouilles voleront
Je chausserai mes espadrilles
Et j’attendrai tranquille sur le plancher des vaches
Le coup de cloche et la chute de midi Icare
Puisqu’à Dame nature a manqué de respect toute l'humanité... / Jean-Paul
Puisque Adam et puisque Eve
Ont été chassés du jardin d’Eden
Puisque nous saccageons les forêts et les rêves
D’y retourner jamais nous sommes bien punis.
Puisqu’avion et puisque voiture
Usines au bout du monde import-export trafic
Puisque désordre et aventure
Nous vivons des vies de fourmis
Puisque 5G ou lampe à huile
Aucun Napoléon ne trouve la marche arrière
Puisqu’on élit le plus débile
Nous avons un monde en folie
Puisque réchauffement de planète
Effet de serre plafond de verre et tout en vert
Puisqu’on est plus de cinq à Sète
Nous sommes une bandes de cons
Puisque chauve-souris pangolin
Nuit de Chine virus à couronne
Puisque c’est l’automne à Pékin
Nous voici confinés
Puisque, perspective d’Afrique,
Nous ne la verrons plus, la neige,
Cela me rend mélancolique
Nous randonnons périphériques
Puisqu’on ne dame pas le pion et même en vérité
Que nos pions n’iront pas à dame
Puisque Sisyphe et Prométhée
Nous sommes bel et bien condamnés
Puisque quelque chose a mal tourné
Puisque monde au bout du rouleau
Puisque système sur le sable
Tant de folie humaine / Jean-Paul
Tant et tant de marins, autant de capitaines
Tant d’ordres et de contr’ordres, de « Garde-à vous ! », « Rompez ! »
Tant de vielles badernes, de casernes, de balivernes et billevesées
Tant de lignes Maginot et de calembredaines
Tant de guerres puniques et des pichrocholines, des Napoléoniennes
Tant de guerres de trente ans, de cent ans qui ont trop épuré, torturé et duré,
Tant d’énergie gâchée à recuire les haines
Tant de trous de verdures à soldats allongés
Tant d’horreurs et tant de charniers
Tant de chevaux crevés, éventrés, achevés
Qui pas plus que les hommes n’avaient rien demandé…
Tant de fois, tant de fois cette question posée :
Est-ce si compliqué que ça de vivre en paix,
D’oublier son cheval pour aller visiter
Un appareil photo posé sur la bedaine
Waterloo morne plaine ou l’ile de Sainte-Hélène
Ou Domremy où Jeanne eût mieux fait de rester
- Tant et tant de marins et tant de capitaines ! -
Filer la laine plutôt que de
Partir joyeuse et conne vers des courses lointaines ?
La Vie / Josiane
Tant de portes fermées
Tant de rêves effacés
Tant de murs dressés
Tant de chemins tracés
Tant de mauvaise graine
Tant de misère humaine
Tant de routes incertaines
Tant de rives lointaines
Tant de recherches vaines
Tant de rires confisqués
Tant de rues bitumées
Tant de terres assoiffées
Tant de sottes idées
Tant de cris étouffés
Tant de champs défrichés
Tant d’humains affamés
Tant d’armes affutées
Tant d’hommes embastillés
Tant de destins fauchés
Tant d’écheveaux filés
Tant de seaux aux fontaines
Tant de filles abusées
Tant de femmes accouchées
Tant de bougies soufflées
Tant de mots galvaudés
Tant de belles rengaines
Tant d’idoles adulées
Tant de recherches vaines`
Tant de rires confisqués
Tant de soleils d’été
Tant de fleurs butinées
Tant de plages souillées
Tant de vieillards fanés
Tant de jardins secrets
Tant de journées sereines
Tant de vins aigrelets
Tant de joyeux banquets
Tant de rêves secrets
Tant de livres fermés
Le Pissenlit / Marie-Thé
Puisque l’aérienne sphère blanche s’est détachée
Un petit souffle de vent en douceur l’a l’embarquée.
Avec son parachute de soie, dans un champ elle s’est posée
Puisque le vent a cessé de souffler
Puisque la pluie est tombée et que la terre l’a absorbée
Dans le pré l’aérienne sphère s’est enracinée
Des feuilles dentées délicieuses à déguster ont poussé
Puisque le printemps est arrivé
Puisque le soleil s’est mis à briller
Des fleurs jaune d’or se sont développées
Qu’il faut bien vite admirer
Puisqu’elles vont se métamorphoser
Puisque les fleurs vont se transformer
Il convient rapidement de les cuisiner
Avec du sucre préparer une gelée
Puisque c’est bon pour la santé
Puisque des fleurs sur le pré sont restées
De nouvelles sphères blanches ont ressurgi
Qui dans le vent se sont envolées
Puisque des enfants d’un souffle les ont propulsées
Rêve impossible / Eliane
Puisque atteindre la lune
Reste un rêve vain pour la plupart
Dans l'espace n'irons pas chercher fortune
Puisque terriens nous sommes et resterons
Puisque nous ne pouvons que rêver au clair de lune
Peut-être rassurés que l'astre ne soit que poésie
Peut-être pour un poème, comme Pierrot, prendrons-nous la plume
Puisque écrire reste à notre portée ;
Puisque, admiratifs devant le courage des spationautes,
Pour nous marcher sur la lune reste un blasphème
Et pour ne pas fouler cet astre qui est nôtre
Puisque se rebeller ne sert à rien ;
Puisque nous aimerions quand même la voir de plus près
Et nous étonner devant son relief accidenté
Nous qui l'imaginions lisse, comme fardée,
Puisque la nuit venue elle nous sourit ;
Puisque j'imagine une longue échelle
Pour la toucher, la caresser,
Témoigner de la tendresse à cette belle,
Puisque qu'elle est la compagne de mes insomnies ;
Puisque je dois revoir à la baisse mes ambitions
Je m'invente une autre lune
Plus accessible à mes attentions
Puisque je ne peux espérer mieux ;
Puisqu'il faut tenir compte de ses moyens
Je crée une lune factice accrochée à un fil.
On me dit que c'est trop facile, que ça ne sert à rien.
Puisque je ne peux pas renoncer à mes rêves.
Espérer / Eliane
Quand devant le naufrage
Nous restons impuissants
Il nous faut du courage
Pour envisager l'avenir
Et ne pas nous noyer dans ce marécage
Menaçant de nous engloutir
Soutenir les soignants que menace le surmenage
Rester vigilants
Respecter le traçage
Pour soi et pour les autres
Même s'il y a du tangage
Rester solides sur ses deux pieds
Sans prise au complotage
Trouver des petites joies dans ce qui nous échoit
Chercher sans relâche quelques avantages
Occuper ce temps qui nous est offert
Sans le perdre à écouter les commérages
Qui, si nous n'y prenons garde
Pourraient nous porter ombrage
Tentons de rire, de rester joyeux
Et croyons en ce vieil adage
« Après la pluie vient le beau temps »
Tenons donc jusque là
Et de nos espoirs ajustons le sertissage
Attendons du soleil l'allumage
Heureux, plus forts de l'expérience
Abordons du bonheur les rivages
Pour en apprécier la beauté.
Tant de... / Eliane
Tant de jours passés
Tant de jours mon aimée
Tant de rancoeurs accumulées
Tant de périodes détestées
Tant de bonheur oublié
Tant de jours aux oubliettes jetés
Tant de chevelure parfumée
Tant d'autos sur les bas-côtés
Tant de rires d'enfants éparpillés
Tant de boutons de roses au petit déjeuner
Tant de soucis accaparés
Tant d'or d'automne à nos yeux émerveillés
Tant de soleils brûlants en plein été
Tant de joies semées
Tant de baisers volés
Tant de sentiments écartelés
Tant d'adieux regrettés
Tant de « je t'aime » prononcés
Tant de repas dégustés
Tant d'amis invités
Tant de rires éclatés
Tant de visages fermés
Tant de rancoeur obstinée
Tant de griefs accumulés
Tant de vaisselle cassée
Tant de sommeils sur le canapé
Tant de moues crispées
Tant de fils coupés
Tant d'histoires détricotées
Tant de photos rangées
Tant de décisions assumées
Tant de mots mêlés
Tant de mots rejetés
Tant d'amertume dévoilée
Tant de chagrins dissipés
Tant de « à quoi bon » proférés
Tant de « je t'ai aimé » bâclés
Tant de séparation déclarée
Tant de « no future » résumés