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L'Atelier d'écriture de Villejean

6 octobre 2015

Cauchemar à Nedjek : Chabotté et Madame Lafée / Dominique MD

L'inspecteur Chabotté enquête après la disparition du bourgmestre M. Leloup, auprès de la tenancière du bistrot, Mme Lafée.

 - Vous, vous appelez La Fée du Logis ou la Fée tout court ?

- Chez nous, on n'a pas de particules, on est des plébéiens pur jus. LaFée tout court, je ne connais pas. Allez voir à Rennes, ils ont Tout Rennes court.

- Bon, Madame Café.

- LaFée !

- Bon, madame, connaissiez-vous le disparu ?

- Le disparu ! Vous n'y allez pas de main morte ! Disons que Mme Leloup a porté plainte. On se demande pourquoi ! D'habitude, elle ne fait pas de démarches, elle ne porte rien, c'est une petite souris..

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- Je vous interroge sur M. Leloup. Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ?

- Pour la dernière fois ? Moi, j'espère que ce n'était pas la dernière fois. J'espère bien le revoir. C'est un bon vivant c't'homme-là !

- Donc, quand l'avez- vous vu ?

- On le voit souvent, et aussi quand va y avoir des élections, il paie la tournée alors.

- C'était quand les élections ?

- Ben c'est vous l'inspecteur, vous devez bien savoir la date des élections !

- Ecoutez, Madame Café au lait.

- LaFée !

- Ecoutez, Madame LaFée au lait. C'est moi qui pose les questions, et vous, vous répondez. Réponses courtes, précises. Que faisiez-vous dans la nuit du 22 au 26 ?

- Ben, dites donc, elle est longue votre nuit. Une nuit de cent heures ! Ça alors ! Y a eu une éclipse totale de soleil qu'a duré quatre jours ! Là, j'ai rien vu moi ! Ils en ont pas parlé à la télé ! C'est vrai qu'ici, y'a toujours le néon allumé, alors forcément j'vois pas trop l'extérieur. Mais quand même, j'men s'rais aperçu de l'éclipse totale !

- Madame Martini, vous nous égarez. C'est vous qui avez une éclipse totale du cerveau. Dites moi plutôt qui voulait faire disparaître Monsieur Leloup.

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- Oh ! Leloup, il aimait bien Mamzelle Chèvre de Monsieur Seguin. Mais, bon ! Dans sa situation, c'était pas possible de courir les près derrière une jeunette.

- Qu'est ce qu'elle est devenue cette jeunette ?

- Ben, elle a disparu aussi ! Monsieur Seguin pleure, mais il ne porte pas plainte, lui. Il sait qu'il faut que jeunesse se passe.

- Monsieur Leloup aurait disparu avec Mademoiselle Chèvre de Monsieur Seguin ? Ça alors ! Vous essayez de m'emmener sur une drôle de piste.

- Mais, non. Pour aller chez Monsieur Seguin, c'est pas une piste. C'est un petit sentier dans le bois, et ensuite on traverse la grande prairie verte.

- Et, comment il va, Monsieur Seguin ? J'aimerais bien le rencontrer lui aussi.

- Ca alors ! Vous voulez voir M. Seguin ! Mais personne ne veut le voir. Quand il arrive au bistrot, tout le monde s'écarte. Il sent trop le bouc, c't'homme-là. Il est trop sauvage, si vous voulez savoir. Même que maintenant, il a acheté un patou, vous savez ces gros chiens qu'ont un collier clouté, et si Monsieur Leloup revient voir Mamzelle Chèvre de Monsieur Seguin, sûrement il va lui lâcher le chien dessus.

- Je ne comprends plus rien. Vous m'avez dit que Mlle Chèvre était partie. Pourquoi Leloup reviendrait-il ?

- J'sais pas tout, moi. Peut-être qu'elle a des remords, qu'elle veut consoler son vieux. Peut-être qu'elle veut l'héritage aussi. Si elle revient pas, elle aura rien.

- Vous en savez des chose, vous ! Donc, pour vous, Monsieur Leloup n'a pas été assassiné ?

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- Vous avez vu du sang, vous ? Où est-ce qu'il aurait été assassiné ? Ya pas de château de Barbe-Bleue ici !

- Vous confondez tout. Barbe-Bleue a assassiné sept femmes mais pas un seul bourgmestre !

- C'est pas une raison. Il peut changer, il peut attirer les hommes maintenant. C'est possible avec le mariage pour tous.

- Allons, donc ! Vous suggérez que Monsieur Leloup et Monsieur Barbe-Bleue auraient pu convoler en justes noces ?

- C'est vous qui le dîtes !

- Mais qui les aurait mariés ? C'est tout de même Leloup , le bourgmestre !

- Oui, mais ils peuvent se marier ailleurs !

- Donc, résumons ! Monsieur Leloup est attiré par Mademoiselle Chèvre, et par Monsieur BarbeBleue. Il n'a peut-être pas été assassiné mais mangé par un patou et il se trouve peut-être dans une cave du château de Barbe-Bleue, ou bien dans un bourg dont il n'est pas le bourgmestre ?

- Oui, peut-être dans un autre pays. Un pays accueillant. Tiens, l'Allemagne par exemple ! Voilà un pays accueillant ! Les gens manifestent pour vous accueillir. Ils ont dit qu'il fallait ouvrir la forteresse de Schengen. Toutes les femmes emprisonnées par tous les Barbe-Bleue du monde vont pouvoir se réfugier dans la forteresse de Schengen.

- Je comprends plus rien à cette histoire. BarbeBleue, c'est un gentil ou un méchant ? Mademoiselle Chèvre, elle est toujours là ou elle est en Allemagne ? Monsieur Leloup, il va revenir ou rester à Berlin ? 

 

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6 octobre 2015

Cauchemar à Nedjek : Interrogatoire de M Faux-Pas, le petit Poucet, par l'inspecteur Chabotté / Anne-Françoise

 - Quels étaient vos rapports avec Mr Leloup ?

 -  J'ai de bons rapports avec Mr Leloup et ce, depuis longtemps. C'est mon ami et on s'appelle par nos prénoms. » répondit le petit Poucet qui avait bien grandi et qu'on surnommait maintenant le grand Majeur.

Il poursuivit :

- En effet, lorsque j'étais enfant, j'habitais avec mes parents et mes frères une pauvre masure dans la forêt. Loulou habitait tout près avec ses parents et ses six frères. De nos deux familles, je ne sais laquelle vivait le plus chichement. Nous ne mangions pas à notre faim tous les jours, croyez-moi... Puis il m'est arrivé une histoire avec un ogre et ce jour-là, comme cet ogre bouillait dans plus d'une dizaine de marmites, j'ai invité la famille loup pour le manger avec nous. On s'est régalés pendant deux semaines ou plus ! Ca nous a soudés, tous ces repas pris ensemble. L'après-midi, nous faisions la sieste ou nous jouions aux billes avec de petits cailloux blancs que j'ai toujours dans ma poche. Nos familles ont déménagé dans la maison de l'ogre et nous avons grandi ensemble.

 - Quand l'avez-vous vu pour la dernière fois ?

 - Je l'ai vu vendredi. Il allait porter une galette et un petit pot de beurre à sa grand mère qui habite de l'autre côté de la forêt. Mme Leloup lui disait : « Fais bien attention aux petites filles en rouge qui cueillent des fleurs dans la forêt .» Et je ne l'ai pas vu depuis.

 - Que faisiez-vous dans la nuit du 22 au 26 ?

 - J'étais avec mes six frères. Je vais vous expliquer. Mes frères et moi avons fait des études de médecine et la secrétaire de l'hôpital, celle qui n'a pas grand chose dans la tête et qu'on surnomme entre nous « la princesse au petit pois » nous avait envoyés, mes frères et moi, ausculter tout un village dont les habitants dormaient. On y a passé un temps fou, on a tout fait pour les réveiller : des électrochocs, des injections de sauge, des perfusions de poudre de perlinpinpin. Rien n'y a fait. On avait le moral dans les chaussettes. Pour se redonner du courage, on est rentrés en chantant :  « Heho, heho, on rentre du boulot... » Quand on est arrivés chez nous, on s'est endormis direct tellement on était fatigués.

 -  D'après vous, qui pouvait lui en vouloir au point de le faire disparaître ?

 - Moi, je soupçonne cette folle de Cendrillon. Elle était verte de rage quand mon ami Loulou a bouffé quatre rats, un vieux chien et une citrouille qui étaient sur le trottoir. Un goûter comme ça, ça ne doit pas traîner dans la rue ! Surtout que Loulou avait vraiment faim... Il avait bossé d'arrache-pied sur le nouveau lotissement du village. Il avait galéré avec les constructions en paille, en bois et en pierre des trois entrepreneurs locaux qui, aussitôt qu'ils le peuvent, mettent des bâtons dans les roues du vélo de Loulou. En fait, ils lui reprochent d'être enrhumé. Mais moi, je le sais, mon ami est allergique, c'est pour ça qu'il a tendance à éternuer un peu fort parfois. C'est quand même pas de sa faute si leurs constructions tiennent pas la route et s'écroulent pour trois fois rien.

Mais je sais aussi qu'il a refusé un permis de construire à une famille grognon. Ils voulaient un grand garage pour mettre une grande voiture, un moyen garage pour une moyenne voiture et un petit garage pour une petite voiture. Loulou leur a suggéré de prendre le bus. Ils sont partis en bougonnant quand ils ont compris que ce serait le même bus pour les trois et non pas un grand bus, un moyen bus et un petit bus !

- Ce n'est pas facile d'être bourgmestre tous les jours !

- Il y a aussi cette chèvre et sa marmaille qui lui empoisonnent la vie. Ils refusent de lui ouvrir la porte lorsqu'il tire sur la chevillette pour que la bobinette choie. Derrière la fenêtre, ils se moquent de lui en criant : « Montre nous patte blanche ! ».

Il y a aussi ce garnement de pain d'épice qui court partout et qu'on risque à tout moment d'écraser. Loulou lui a déjà fait la leçon bien des fois mais il s'enfuit sans jamais rien écouter !

Sans compter cette compagnie d'animaux SDF qui a fait un boucan horrible et qui voulait aller à Brême avec un joueur de flûte et des rats... »

30 septembre 2015

Consigne d'écriture 1516-04 du 29 septembre 2015 : Insérer Mishima chez Eluard

Insérer Mishima chez Eluard

Vous écrivez un texte. Vous insérez au milieu de votre texte ce fragment de roman de Yukio Mishima :

- Hatsue ! cria le garçon.
- Saute par-dessus le feu ! Si tu sautes par-dessus… » dit la fille d’une voix claire et forte.

Le garçon n’hésita pas. Le corps nu que la flamme illuminait, il prit son élan sur la pointe des pieds et bondit au travers du feu. En un clin d’œil il se trouva face à la fille. Sa poitrine toucha légèrement les seins de Hatsue…

Vous pouvez en plus utiliser des images de la poésie suivante :

A la flamme des fouets (Paul Eluard)

Métal qui nuit, métal de jour, étoile au nid,
Pointe à frayeur, fruit en guenilles, amour rapace,
Porte couteau, souillure vaine, lampe inondée,
Souhait d’amour, fruit de dégoût, glaces prostituées…

29 septembre 2015

Solitude / Josiane

Je coupe le silence,
Ouvre la radio, la ferme,
Allume à nouveau le silence.
Rien ne va mieux, rien n'est mieux.
La rue est parfaitement vide et sale,
Comme l'heure qui se lève,
Comme mes sueurs juvéniles
Que je laisse traîner
Dans la main neuve du matin.

Sur les pavés courent
Des femmes grises comme le temps.
Un enfant posé sur un banc de pierre
Compte des nuages tracés à la chaux.

Hier était un lundi,
La semaine encore jeune,
Le matin criait sa joie
Dans la tiédeur d'un ciel ardent.

Où est le soleil de ce matin flamboyant ?

Le soleil s'est perdu au delà de la colline,
Derrière les fresques bleues des grands châtaigniers.
J'ai perdu jusqu'à l'odeur de ta peau,
Je suis fou,
J'allume un feu sur la gelée blanche de mes regrets.

Sur les pavés inégaux
Résonne encore le bruit de tes pas.

Je coupe le silence,
Ouvre la radio,
Rien ne va, rien n'est mieux.
Un vent désespéré à claqué le volet.
Une vieille a tendu une main décharnée au pigeon affamé.

Une autre solitude. 

29 septembre 2015

Le garçon et la fille de la forge/ Anne-Françoise

 

Au matin, le feu craquait dans la forge.

A midi, on l'entendait vrombir, lancé à plein régime.

Au soir, il ronronnait doucement en rougeoyant...

 Certains jours de nuit, le métal, de frayeur, courbait l'échine et se tordait de douleur. Le marteau rapace frappait en mesure le tocsin et l'enclume ravageuse lui offrait sa résonance macabre. Le métal devenait souillure vaine du désespoir.

 Certaines nuits de jour, le métal fondait de plaisir sous la caresse de la flamme. Le forgeron magicien lui donnait à danser des volutes souples ou des arabesques envoûtantes sous l'emprise des souhaits d'amour qui guidaient ses gestes.

 La forge abritait un village de lutins qui menaient leur vie à l'humeur du jour ou de la nuit. Deux jeunes adolescents avaient pris l'habitude de se retrouver le soir près du feu. L'un et l'autre se lançaient des défis pour jouer, rire, découvrir mais aussi pour s'éprouver, rivaliser et même blesser.

 Ce soir d'hiver-là, Hatsue et le garçon s'étaient d'abord raconté des histoires improbables, fruits en guenilles et porte couteau. Ils s'étaient ensuite placés l'un en face de l'autre de chaque côté de la forge.

« Hatsue ! Cria le garçon

  • Saute par dessus le feu. Si tu sautes par dessus... dit la fille d'une voix claire et forte. Le garçon n'hésita pas. Le corps nu que la flamme illuminait, il prit son élan sur la pointe des pieds et bondit au travers du feu. En un clin d'oeil, il se trouva en face de la fille. Sa poitrine toucha légèrement les seins de Hatsue... »

L'un et l'autre furent surpris de ce qui venait fortuitement de se produire. Un silence de glace s'en suivit. Pour briser la gène qui commençait à étouffer le feu, Hatsue félicita son camarade : « Whaou ! Je n'ai même pas eu le temps de te dire ce que je te réservais si tu sautais que déjà, tu avais bondi ! » Le garçon lui répondit : « Je suis capable de relever tes défis sans que tu aies besoin d'y rajouter un enjeu... Mais tu m'intéresses, quelle était la fin de ta phrase ?

  • Si tu sautes par dessus... tu découvriras l'étoile au nid » compléta Hatsue.

Des petites flammèches s'échappèrent du feu qui s'endormait. Elles dessinaient des images fugitives sur les murs de la forge. Ces images goûteuses, parfumées, luxuriantes, calmes et sensuelles se gravèrent dans les yeux des deux adolescents tout troublés.

En ouvrant son atelier le lendemain matin, le forgeron découvrit les deux lutins. Ils étaient enlacés là, nus, au milieu du feu, dans des draps de soie rouge. Une petite couche de cendre leur servait de couverture. Ils souriaient.

Le forgeron, décontenancé, se tourna vers son grand soufflet qui se gonfla et fit passer sur le feu un air doux. Le garçon et la fille s'envolèrent et disparurent...

Le feu se réveilla et le forgeron se mit au travail. Ce fut un jour onirique. Le métal se plia à toutes les volontés des rêves de celui qui n'avait jamais pensé créer les formes qui sortirent du feu. Il ferma son atelier le soir venu...

Une lampe qui déambula dans les rues cette nuit là crut voir de drôles de lueurs s'échapper de la forge. Elle entendit des rires étouffés et des caresses soyeuses passer par la cheminée et monter en farandole dans la nuit étoilée...

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29 septembre 2015

A tes souhaits / Jean-Paul

Tous les souhaits d’amour
Parcourent
Le réseau de nos veines.

Parfois un ange passe,
Semant l’amour rapace,
Faisant naître nos peines.

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C’est l’âge adolescent,
Métal incandescent
Qui ronge

Et accroche au linteau
De la porte le couteau
Du songe.

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C’est un temps de chenilles :
Pour des fruits en guenilles
On tente le démon.

Des étoiles ont surgi
Au pays du Fuji
Pour entourer le mont.

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- Hatsue ! cria le garçon.
- Saute par-dessus le feu ! Si tu sautes par-dessus… » dit la fille d’une voix claire et forte.

Le garçon n’hésita pas. Le corps nu que la flamme illuminait, il prit son élan sur la pointe des pieds et bondit au travers du feu. En un clin d’œil il se trouva face à la fille. Sa poitrine toucha légèrement les seins de Hatsue…

Et elle disparut
En un éternuement
Dans les nuées célestes.

Comme une étoile au nid
Pour l’oiseau ferrailleur
On ramène chez soi

Une âme désunie,
Une pointe à frayeur
Une échelle de soie.

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 On l’accroche au nuage,
On franchit un barreau,
On s’agrippe aux montants.

A quoi bon s’évertuer ?
Les glaces prostituées
Fondent sur le printemps

Car le nuage est l’ange,
La flamme est le fouet
Et la souillure est vaine.

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Ils sont loin désormais
Tous ces jeux de folie.
La nuit les cicatrise

Les anciennes brûlures,
Les émois de jadis
Le temps les électrise.

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Sur la chaise, au jardin,
Sous les grands pruniers roses
Un vieillard se souvient

Et la lampe, inondée
Des jeunes papillons
Naufragés de minuit,

S’éteint avec le feu
Qui brûlait sous ses pieds
Et sous son torse nu.

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29 septembre 2015

Jeune amour / Eliane

Il l'avait vue à la fête. Il accompagnait ses parents à cette manifestation organisée par les comités de plusieurs villages des alentours.

Bien qu'il fasse dans la région de longues balades à vélo, il ne l'avait jamais rencontrée, mais il ne pouvait pas la manquer, elle était lumineuse.
Il la dévorait des yeux mais n'osait faire plus. Elle lui sourit.

C'était fou comme ce sourire le rendit heureux, alors il s'enhardit et alla lui acheter une glace. Ils échangèrent leurs prénoms :
- Hatsue, dit la jeune fille.
- Yam, répondit le garçon. Ils indiquèrent aussi le nom du village dans lequel ils habitaient.

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Yam se promit d'aller très vite traîner sa bicyclette par là-bas et il la croisa un jour qu'elle revenait d'aller chercher des œufs à la ferme. Il descendit de vélo et ils firent quelques pas ensemble. Alors ils se promirent de se revoir le surlendemain pour aller se promener le long de la rivière.


Le garçon était comme habité, il ne pensait plus qu'à elle, sans cesse son visage était présent à son esprit, il la trouvait si belle. Ses parents s'étonnaient de le voir si souvent rêveur, les yeux dans le vague, dans la lune.

Hatsue, quant à elle, se sentait flattée, le garçon était séduisant, elle ne savait pas encore si elle était amoureuse, il y avait si peu de temps qu'ils se connaissaient.

Mais le temps passait et ils se voyaient beaucoup. A pied ou en vélo ils explorèrent les environs, s'intéressant à mille choses qu'ils se montraient l'un à l'autre, s'extasiant aux mêmes moments, aux mêmes endroits. Ils se mirent à rire ensemble de plus en plus souvent, se prirent timidement la main.

C'était délicieux, ils ne voulaient pas que cela s'arrête.

Yam lui écrivit des poèmes candides et innocents comme il l'était, un peu mièvres, comme :

Souhait d'amour
Pour toujours
Visage aimé
D'une nuit étoilée
Je te veux mienne
Ma main dans la tienne.
Souhait d'amour
Pour toujours

 

La lecture de ces quelques vers la laissait toujours attendrie et elle conservait précieusement ces poésies dans un tiroir de la commode de sa chambre. Il lui arrivait souvent de les relire.

Un après-midi, après une course poursuite en vélo, ils s'arrêtèrent essouflés et en sueur, posèrent leurs bicyclettes contre le tronc d'un arbre et s'assirent sous son ombre bienfaisante.

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Ils s'allongèrent, trop fatigués pour parler, elle ferma les yeux. Le jeune homme en profita pour la contempler tout à sa guise, légèrement penché vers elle, et vint délicatement poser ses lèvres sur les siennes. Elle ne le repoussa pas mais ils en restèrent là. Quand ils se relevèrent pour rentrer ils étaient sur un petit nuage.

Plus tard il l'invita à goûter chez lui et la maman comprit enfin pourquoi son garçon avait l'air si épanoui ces derniers temps. Elle trouva la jeune fille charmante, jolie, bien élevée.

Un autre jour, au cours de l'une de leurs balades, ils virent qu'un paysan avait allumé un feu dans son champ pour brûler quelques mauvaises herbes et branches mortes. Cela donna une idée à Hatsue, elle allait mettre son soupirant à l'épreuve, lui lancer un défi. Elle courut dans le champ et vint se placer derrière le feu.

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- Hatsue ! » cria le garçon.
- Saute par dessus le feu ! Si tu sautes par dessus..., dit la jeune fille d'une voix claire et forte. Le garçon n'hésita pas. Le corps nu que la flamme illuminait, il priit son élan sur la pointe des pieds et bondit à travers le feu. En un clin d'oeil il se trouva en face de la fille. Sa poitrine toucha légèrement les seins de Hatsue.

Ils furent tous deux comme électrisés. Elle n'avait même pas eu le temps de formuler quel était l'enjeu du défi. Elle le regarda avec des yeux neufs, il était courageux, il était son héros, elle en était sûre, elle était amoureuse.

L'année scolaire s'était terminé, Hatsue qui était très bonne élève, devait partir pour l'Université, dans la grande ville voisine.

Le jour du départ il l'accompagna à la gare. Tous deux étaient en pleurs et se firent des adieux déchirants : ils allaient tellement se manquer. Ils se promirent de s'écrire chaque jour en attendant les prochaines vacances.

Au début les missives furent très régulières, pleines de mots d'amour, pleines de manque.

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Mais Hatsue se fit beaucoup d'amis à l'Université. Yam quant à lui débuta un apprentissage dans lequel il s'investit beaucoup. Les lettres se firent de plus en plus rares, ils avaient moins de temps pour écrire et même pour penser l'un à l'autre.

Hatsue se lia avec un étudiant. Yam, à un bal de village, rencontra une jeune fille toute simple qui titilla ses sens.

Quand plus tard ils se retrouvèrent, ils furent stupéfaits de ne plus éprouver l'un pour l'autre qu'une chaude tendresse amicale. Le temps des balades à vélo ou le long de la rivière était le très beau souvenir d'un premier amour.

29 septembre 2015

Le goût des glaces prostituées / Jean-Paul

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Sur la pointe des pieds
L’esquimau allait voir
Les glaces prostituées.

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Dépourvues de guenilles
Elles vendaient
Au plus offrant

Leur monstruosité
D’iceberg incandescent,
Leurs caresses de vagues,

Le métal de leurs flancs
A stries parfois rosées,
Leur volupté d’étoile
Et leurs promesses d’inondation
Dans l’avenir plus ou moins proche.

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Ca réjouissait l’esquimau
Mais jamais il n’a sauté
Par-dessus le feu allumé.

On ne suit pas les glaces
Quand elles dérivent ainsi
Dans des poses lascives.

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 On n’achète pas les îles qui flottent
Sans culotte
Près de la glaciaire calotte.

Mais de les regarder en rêvant d’idéal
Ca lui chauffait le cœur,
Ca lui chauffait le corps
Et c’était bien plus beau encore
Que la plus scintillante des aurores boréales.

Les photos ont été prises à La Flèche (Sarthe) le 12 juillet 2015.
Les oeuvres exposées sont celles de Valérie Daubé et Guillaume Castel.

Ecrit à l'atelier d'écriture de Villejean le 29 septembre 2015 d'après cette consigne :

Utiliser des images de la poésie suivante :  

A la flamme des fouets (Paul Eluard)  

Métal qui nuit, métal de jour, étoile au nid,
Pointe à frayeur, fruit en guenilles, amour rapace,
Porte couteau, souillure vaine, lampe inondée,
Souhait d’amour, fruit de dégoût, glaces prostituées…

22 septembre 2015

Consigne d'écriture 1516-03 du 22 septembre 2015 : Logorallye de la francophonie

1516-03 Logorallye de la francophonie


Chacun donne un prénom masculin se terminant par "e" et un prénom féminin ne se terminant pas par "e".
Voici le résultat de la collecte : Alexandre, Rachel, Emile, Eva, Jérôme, Nolwenn, Ivanhoé, Violetta, Jacques, Mary, Antoine, Gwen, Philippe, Margareth, Amédée, Léna, Eugène, Marion

Ensuite l’animateur distribue six ou sept expressions de la francophonie différentes (extrairtes du « Petit dictionnaire insolite des mots de la francophonie » de Loïc Depecker) à chacun(e). Il demande d’en insérer une ou deux dans son texte où figure un (ou deux ou plus) des personnages à prénom de la liste partagée. Les listes tournent toutes les dix minutes.

Bonne arrivée ! = Bienvenue ! Afrique
Camembérer = Sentir fort des pieds Afrique
Charlater = Consulter un guérisseur ou un devin Afrique
Couteauner = Donner un coup de couteau Afrique
faire boutique mon cul = Se prostituer Afrique
La gromologie = Parler un français pompeux Afrique
Les organes de base = Les testicules Afrique


Nobscuriter = Faire l’amour Afrique
Pilipilisé = Pimenté, asssaisonné au pili-pili Afrique
Prendre le train (la ligne) onze = Aller à pied Afrique
Siester = Faire la sieste Afrique
Un causeur = Un intervenant d’un colloque Afrique
Un arriéro = Le postérieur d’une femme Afrique
Un cabri = Voyageur sans billet Afrique


Un cul vert = Un véhicule diplomatique Afrique
Un deuxième bureau = Une maîtresse, une amante Afrique
Un golo = Un bouffon, un clown Afrique
Un jaguar = Un homme élégant Afrique
Un maquis = Petit restaurant souvent clandestin Afrique
Un mon mari sort je sors = Nom d’un pagne Afrique
Un pamplemousse = Une femme de forte corpulence Afrique


Un poulet bicyclette = Un poulet élevé en plein air Afrique
Un ventre administratif = Un ventre arrondi Afrique
Un ziboulateur = Un ouvre-bouteille Afrique
Une nuit grave = Une cigarette Afrique
Une ton pied mon pied = Une femme qui surveille son mari en permanence Afrique
Voler la route = Conduire sans respecter le code de la route Afrique
Zidaner = Donner un coup de tête Afrique


Cocagner = Vivre aux crochets d’autrui Antilles
comme une diarrhée = Tout-à-coup Antilles
Douciner = Caresser doucement Antilles
Etre rond comme une boule carrée = Etre bien ivre Antilles
Fouiller patate = Mettre les doigts dans son nez Antilles
La zoreillerie = La métropole Antilles
Lavander = Faire la lessive Antilles


Noëler = Fêter Noël Antilles
Un bazardier = Un commerçant du marché Antilles
Un bonbon-fesses = Un suppositoire Antilles
Un zézère = Un petit ami, un amoureux Antilles
Une dodine = Un fauteuil à bascule Antilles
Une madame je suis = Maîtresse femme qui aime s’imposer Antilles
Une maman-violon = Un violoncelle Antilles
Une musique la gueule = Un harmonica Antilles


Battre le beurre = Parler hors de propos Belgique
Blinquer = Briller, reluire Belgique
Déloger = Découcher, ne pas rentrer chez soi Belgique
Faire le chat = Faire l’école buissonnière Belgique
Faire un à-fond = Boire cul sec Belgique
Fristouiller = Frire de façon appétissante Belgique
La dringuelle = Un pourboire ou l’argent des étrennes Belgique
Les grenailles = Le gravier, Les gravillons Belgique
Péteux = Qui pète plus haut que son cul Belgique


Un kot = Une petite chambre d’étudiant Belgique
Un verdurier = Un marchand de légumes Belgique
Un(e) mêle-tout = Importun qui met partout son grain de sel Belgique
Une carnassière = Un cartable Belgique
Une chiquelette = Un chewing-gum Belgique
Une drache = Forte averse Belgique
Une guindaille = Fête joyeuse et bien arrosée Belgique
Une savonnée = Petite lessive rapide faite à la main Belgique


Accrocher ses patins = Cesser d’exercer une activité Canada
Avoir son voyage = En avoir assez Canada
Babouner = bouder Canada
D’arrache-poil = D’arrache-pied Canada
Etre benaise = Etre dans un état de contentement Canada
Faire du pouce = Faire de l’auto-stop Canada
Faire patate = Rater son coup Canada


La sloche = Neige fondue de consistance boueuse Canada
Magasiner = Faire ses courses Canada
Rêver en couleurs = Se faire des illusions Canada
S’encabaner = Rester chez soi Canada
S’enfarger dans les fleurs du tapis = S’emmêler les pinceaux Canada
Siffler dans la nuit = Perdre sa peine Canada
Trippant = excitant Canada


Un écoeurant = Un salaud Canada
Un serre la piasse = Un avare Canada
Une agace-pissette = Une allumeuse Canada
Une jambette = Un croc-en-jambe Canada
Une jobine = Un petit boulot Canada
Une poutine = Portion de frites tapissée de fromage et de sauce pimentée Canada
Une tabagie = Un bureau de tabac Canada


Une vadrouille = Un balai à franges Canada
Rêver aux ours = Faire des cauchemars Canda
A la précipitée = De façon hâtive Suisse
Quequeiller = Parler en hésitant ou bégayant Suisse
Une cachemaille = Une tirelire Suisse
Une pelle à chenit = Un ramasse-poussière Suisse

22 septembre 2015

Au même instant mais sans doute pas à la même heure /Jean-Paul

MARCHAND DE CAILLOUX

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Aujourd’hui, Alexandre a son voyage ! Ca fait des années qu’il travaille d’arrache-poil dans cette boîte de marde, à faire toutes sortes de choses, utiles ou pas, pour que de grands niaiseux puissent se retrouver benaises dans des beaux bureaux tout en verre après avoir décroché leur diploume. Il faut croire que la dernière année est toujours l’année de trop ! En tout cas, tout en babounant et bouboussant, il se dit qu’il ne va pas faire patate le jour qu’il accrochera ses patins, si jamais sa patronne lui organise une party de départ. Si on veut aller au bout du monde, c’est sûr qu’il faut voyager léger. Ca va lui faire du bien, ce jour-là, de vider son sac !



02 Ostende_IMG_1834PARS !

Ce soir Marion va déloger. Elle va faire le chat. Plus que ça même ! Elle va quitter pour toujours le domicile conjugal, larguer ce péteux qui enchaîne à-fond sur à-fond et bat le beurre ensuite. Fini de faire fristouiller pour ce type les petits plats dans la cuisine, de faire blinquer l’argenterie. Elle va dire adieu à sa baraque à frites, aux plus belles années de sa vie qu’elle a gâchées avec lui. Elle a ramassé toute la dringuelle qui traînait ici et là. Elle a posé son sac sur le siège arrière, est montée dans la voiture, a claqué la porte, démarré. Les pneus ont crissé et fait voler quelques grenailles. Elle a mis un CD de rock et a pris la route d’Ostende.

 


LA PETITE TONKINOISE


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Le 4x4 s’est arrêté devant la maison près du baobab. C’est un cul-vert et c’est Philippe qui le conduit. Léna l’attend calmement, tranquillement dans l’ombre du géant. Elle est comme toujours terriblement excitante dans son mon mari sort je sors. Quel golo, que ce mari-là ! Léna est le plus beau deuxième bureau de tout le Congo mais l’autre ne s’est jamais rendu compte qu’il possédait un trésor dans sa case. A croire qu’il lui en manquait une ! Il paraît même qu’il a de son côté une liaison avec un pamplemousse. Il a suffi à Philippe d’arriver habillé comme un jaguar, d’emmener Léna au maquis une ou deux fois et elle a été à lui vite fait bien fait. Le plus dur sera de lui faire avaler, à la fin de cette nuit-ci, qu’il retourne mardi en Europe pour être affecté dans une nouvelle ambassade quelque part dans le monde ; partout ailleurs sauf ici, c’est son choix. Les climats tropicaux et les femmes trop piquantes, on s’en lasse, à la longue.


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VEUVE NOIRE

Eva a beau frotter, frotter avec la vadrouille, rien n’y fait, la tache de sang ne disparaît pas. Elle a bien ramassé les morceaux du cadavre avec la pelle à chenit, les a glissés un par un dans les grands sacs poubelles bleus mais elle bute sur ce dernier écueil d’une tache débile, indélébile, obnubilante au point qu’elle se fait de la bile. Elle a trouvé vite fait la cachemaille du vieux qui quéqueillait avant qu’elle ne le zigouille et ne se rhabille, elle n’a rien fait à la précipitée, elle a empoché le pactole mais elle ne pouvait décemment pas partir en laissant la maison dans cet état. Ca aurait fait rêver aux ours dans les chalets des environs. On est Suisse ou on ne l’est pas. Chez nous, les gens, même à la tronçonneuse, on les tue proprement.


BA MOIN A TI BO

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- Faut qu’on arrête de cocagner, a lancé Amédée à Rachel. Tous ces gens qui travaillent dans la zoreillerie et nous qu’on est là à fouiller patate en buvant des ti punchs, faut vraiment qu’on se resaissise. Rachel qui lavandait dans la buanderie lui a répondu :
- Parle pour toi, fainéant ! T’es encore rond comme une boule carrée, à cette heure, pour tenir de tels propos !

- Mais non, mais non, plaisante Amédé, je ne suis pas marti boire, je suis Martiniquais. D’ailleurs, en parlant de ça… Viens donc ici que je te doucine, ma Doudou !
Las ! Comme une diarrhée, en voulant s’extirper du hamac, il s’est viandé. Ca a fait "ploc", ça a fait "ouille", ça a fait "dring dring", ça a fait "pin pon pin pon". Bref ça a été assez bruyant finalement le jour ou Amédée, attisé, affaissé, a fait son AVC !


LE BLUES DU DENTISTE

- Bonne arrivée ! a déclaré Margareth en ouvrant la porte du cabinet médical.

C’est la première fois qu’Antoine vient charlater ici et il se dit qu’il a bien fait de prendre son bain annuel dans le fleuve Niger. Déjà qu’en temps ordinaire il camembère un max ! S’il avait su que le docteur serait une doctoresse, blanche de surcroît, il aurait fait trempette un peu plus longtemps et aurait même demandé à Boris le pluvian de lui nettoyer les molaires comme il fait au croco et à ses frères.

- Que puis-je pour vous ? demande Margareth. Votre mal est-il profond ?


Qu’est-ce qu’elle à, la toubibe, à pratiquer la gromologie ?


- Eh bien voilà, répond Antoine. Je suis un peu gêné pour vous dire… C’est rapport à mes organes de base !

- Qu’est-ce que vous appelez comme ça ?
- Le mieux est peut-être que je vous montre ?

Il se lève et baisse pantalon et slip.


- Tudieu ! La grosseur des testicules ! s’écrie Margareth. Comment ça vous est arrivé ?.

- Eh bien voilà, répond Antoine, je pense que c’est samedi dernier. Je suis allé voir les femmes qui font boutique mon cul.

Le médecin reste silencieux un temps assez long puis elle déclare solennellement.

- Je pense que vous n’y couperez pas : il va falloir couteauner dans tout ça !

Et moi je pense qu’il va falloir que je me creuse vraiment le ciboulot pour établir un lien entre tous ces personnages si je veux écrire avec ça une histoire qui tienne debout. Et déjà, pour que ce soit compréhensible, il faudrait que je me-vous procure le « Petit dictionnaire insolite des mots de la francophonie » de Loïc Depecker afin qu’on puisse décrypter ce schmilblick international !

 

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P.S. Les photos ont été empruntées aux généreux donateurs du net. Merci à eux !

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