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L'Atelier d'écriture de Villejean
13 janvier 2015

Lettre à Wolinski / Jean-Paul

Mon cher Georges

AEV 1415-14 Wolinski

Je ne puis penser à toi sans me remémorer le quai Montebello et le quai de la Tournelle où je me suis procuré l’essentiel des numéros de Charlie mensuel de ma collection. C’était une drôle d’époque que ces années après 1974. Toi tu ne pensais qu’à ça et moi je ne pensais à rien, à rien d’autre qu’à lire et consommer des images et des mots dans une grande ville, dans la capitale de la France, dans un Paris qui, comme à Jacques Rivette, m’appartenait.

Je ne sais pas où Hara-kiri avait son siège. Moi j’avais le mien près des Buttes Chaumont, pas loin de cet endroit où, de nos jours, ont lieu des trafics d’influence et d’armes de combat. Rien de plus pacifique pourtant à l’époque que ce petit temple romain haut perché par-dessus la pièce d’eau. Devant mon appareil photographique de marques Zenit je tenais une feuille de rhodoïd bleu pour fabriquer des images originales. Un peu plus loin, vers la porte de Pantin, là où se trouve désormais la Cité de la musique, il y avait un petit théâtre où j’allais voir et écouter Malicorne, les frères Robin et Barry Dransfield, le groupe Gryphon. Le lundi c’était concert de folk. Le mardi c’était fièvre acheteuse à la FNAC de la rue de Rennes.

AEV 1415-14 ParisTu ne traîneras plus tes guêtres à Paris. Tu as eu une belle mort, finalement, entouré de tes potes, encore et toujours à essayer de dresser le portrait du roi des cons, mais cette tentative toujours sera désespérée autant que désespérante. Comme a dit un autre Georges, il est indétrônable. Je t’aurais bien donné le bonjour de Paulette de Pichard mais je l’ai perdue de vue ainsi que tous les gens de la rue de Louvois que je retrouvais le midi dans ce café le long de la rue de Richelieu près de la Bibliothèque nationale. Le coiffeur pied-noir de la rue Chabanais a dû prendre sa retraite et cassé sa pipe depuis longtemps.

Il faudrait que je retourne à Paris. Je ne situe même plus le Studio 28 et l’Olympique ailleurs que dans un arrondissement, un bloc approximatif, le 18e, le 14e sur le plan. Pourquoi ai-je passé ma jeunesse à ne jamais prendre de notes, à ne jamais chercher à avoir prise sur le réel alors que je ne puis plus passer une journée désormais sans écrire comme toi sans doute sans dessiner.

Faudra-t-il que j’aille ouvrir la valise d’archives au grenier, voire les boîtes de photos en noir et blanc de ces années-là ? A quoi bon ? Si c’est pour me découvrir aussi fragile que la semaine dernière heure à la manifestation du 11 janvier ! Là où tu vas, salue Cavanna pour moi. Je l’avais croisé un jour sur un boulevard désert et nous nous étions regardés avec tendresse.

Merci à toi et à toute l’équipe pour ces années de rire et de liberté.

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