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L'Atelier d'écriture de Villejean
24 janvier 2023

Lieux aimés ou détestés /Jean-Paul

Je ne suis pas ici pour raconter ma vie mais je suis quand même bien étonné par la façon dont la fiction, la musique, la culture tiennent une si grande place dans mon rapport au monde.

Dans la troisième partie du questionnaire notamment, à propos des lieux que j’aimerais visiter, le désir de voyage est justifié par une curiosité littéraire ou cinéphilique.

AEV 2223-17 espace-albert-dubout-musee

Palavas-les-Flots, par exemple. Il y a peu encore, j’ignorais la situation géographique de cette cité balnéaire sur la carte de France. Si je m’y rends un jour, ce sera pour voir le musée consacré à Dubout et surtout pour photographier les lampadaires « rafistolés » réalisés d’après les dessins de cet illustrateur très actif dans les années 1930 à 1970. De même que les talons aiguilles et les aspirateurs associés sont très genrés, le style de dessin de Dubout, dont j’ignore le prénom - Albert, nous souffle Maryvonne - est passable aujourd’hui des foudres du mouvement #MeToo. C’est qu’on n’illustre plus impunément de nos jours le marquis de Sade, François Rabelais, le Kama sûtra et San Antonio de même que la caricature de grosses dames mariées à de tout petits messieurs est devenue taboue. Dubout, tabou, mets les bouts ! Si ce musée existe encore et si l’idée me vient de retourner à Sète, d’aller sur les traces de Charles Trénet à Narbonne et de pousser jusqu’à Palavas, j’irai le voir, ce château bâti sur les flots !

AEV 2223-17 JK Dubout 02

Sainte-Sévère-sur-Indre ne dit rien à personne mais doit sa célébrité à un film intitulé « Jour de fête ». C’est le village dans lequel Jacques Tati s’est déguisé en facteur de légende. Il n’y a certainement pas grand-chose à voir à Sainte-Sévère. Une place de village, une route, un pont ? Peut-être trois photos du film dans le hall de la mairie ? Un bistrot du coin ? Y a-t-il une gare seulement ? Une librairie ? Un hôtel restaurant ? A part « Le Défi du samedi » je ne vois pas quel journal serait assez fou pour envoyer Isaure Chassériau qui a troqué récemment le rose pour une garde-robe signée René Magritte mener l’enquête là-bas. Ce qui serait drôle c’est qu’elle y allât avec un grand sac Tati rose emprunté à Jack Palmer !

 

AEV 2223-17 HonfleurHonfleur c’est culturel. C’est la ville dans laquelle sont nés Erik Satie et Alphonse Allais. Il y a un tout petit musée au-dessus de la pharmacie paternelle dans laquelle on expose le crâne de Voltaire enfant et plein d’autres farces de l’oncle Alphonse, inventeur du café lyophilisé et de la peinture monochrome avant Malevitch même. Voir son « Combat de nègres dans une cave pendant la nuit » mais il ne faut plus utiliser ce vocable non plus depuis que l’on a rebaptisé le plus célèbre des romans d’Agatha Christie « Ils étaient dix ». Honfleur mérite sans doute qu’on y séjourne plusieurs nuitées, qu’on écoute les gymnopédies en faisant de l’exercice sur le port et qu’on visite, déguisé en légionnaire, le musée Eugène Boudin, admirable peintre de nuages normands.

 

AEV 2223-17 JK - Le Prisonnier 2

Je ne m’étendrai pas sur Portmeirion, un village-musée au pays de Galles qui a été utilisé pour servir de cadre au feuilleton britannique « Le Prisonnier » de Patrick McGohan. On perçoit très bien d’après mes références datées que je ne suis pas un perdreau de l’année et d’avouer son âge n’est plus très en cour non plus à notre époque jeuniste où ne sont intéressants que les Youtubeurs, les Tiktokeurs, les comploteurs, les influenceurs , les politiqueurs-emmerdeurs de travailleurs et ta sœur qui bat le beurre.

Mais ai-je vraiment envie d’aller à Portmeirion ? Un collègue qui a fait le voyage autrefois m’a confié que l’endroit était bizarre, propice à des mésaventures. A savoir si, une fois rendu là, on ne m’y retiendrait pas prisonnier, affublé d’un badge et d’un numéro, avec l’impossibilité de regagner mon domicile où je me trouve si bien ces derniers temps que j’arrive même à y faire de vraies grasses matinées ? Je vais peut-être juste regarder une fois de plus les dix-sept épisodes de cette série des années 60 en dévédé sur mon ordinateur.

***

Comment ? Il est déjà 19 h 49 ?  Alors comme ça je n’aurai même pas le temps d’expliquer mes rejets de destinations diverses par… l’absence de culture, de possibilité de rêver et la peur viscérale que ne soit mis un terme, accidentellement à mes curiosités enthousiastes de prolo-intello bon vivant ?

C’est pourtant bien le cas à Mourmelon-le-Grand, une ville de casernement en Marne où j’ai passé un an. Imaginez une rue, vingt-trois bistrots, des jeunes gens de vingt ans qu’on utilise un an durant pour qu’ils deviennent des hommes du rang, d’un seul rang, d’une seule tête, alignement Rogntudju ! On appelait ça le sévice militaire, je crois. Ou service mais c’était moins drôle qu’au tennis. Dans cet univers militaire j’ai quand même survécu. Je ne conserve de ce séjour que quelques photographies de jeunes gens idiots, basiques, plus ou moins alcoolos, et le souvenir d’avoir meublé les temps perdus en compagnie d’un guitariste normand quasi-mutique et d’un joueur d’échecs bordelais, musicien lui aussi et œnologue à l’occasion.

AEV 2223-17 Objectif Lune 2

Tant pis ! Vous ne saurez rien de l’austérité du chant grégorien entendu dans l’abbaye de Solesmes, de la laideur constatée et de la dangerosité imaginée de l’EPR de Flamanville où nous nous égarâmes en cherchant le point de départ d’une randonnée. Vous n’imaginerez pas l’estimable opéra de Rennes où je ne vais plus, de peur de me retrouver à nouveau dans une loge du dernier étage avec vue plongeante sur le vide et le sommet du crâne de Yannick Jaulin : une situation insupportable pour un acrophobe.

Du coup, pour me voir monter dans la fusée d’Objectif Lune, désolé, vous ferez Tintin !

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