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L'Atelier d'écriture de Villejean
10 janvier 2017

L'Homme aux cheveux gris / Eliane

AEV 1617-14 L'homme aux cheveux gris

Vêtus de leurs plus beaux atours, le professeur et Philippe descendirent le grand escalier d'honneur.

Ils étaient venus à cette cérémonie pour honorer la mémoire du vieux patriarche, rendant hommage à son dévouement qui ne s'était jamais démenti à la tête de la fondation.

Philippe regardait l'assemblée, se demandant si tout ce beau monde était vraiment compatible avec l'âme de l'entreprise. Mais il savait bien que la fondation avait besoin de donateurs, qu'importait alors l'habit.

Le jeune loup Richard, play-boy de profession, descendit le majestueux escalier en trombe, bousculant le Professeur au passage et créant un appel d'air dans le vaste édifice. On ne pouvait manquer de le remarquer.

- Bonsoir ! cria-t-il. Belle soirée, jolies femmes !

Philippe lui lança un regard noir et lui adressa son rictus le plus vache. Il détestait ce genre d'individu. « Eh, oui, soupira le professeur, il est certain que nous avons besoin de donateurs ! ».

Sur le trottoir, Philippe proposa au Professeur de le raccompagner en voiture. Ce dernier déclina l'invitation, arguant qu'il avait besoin de marcher, qu'un peu d'air lui ferait du bien.

Il marchait depuis dix minutes quand une élégante voiture stoppa à sa hauteur.

- Bonsoir ! dit la conductrice.

Il reconnut une des amies de sa fille. Elle proposa de le prendre à bord et il n'eut pas le cœur de refuser.

Le court trajet fut très agréable : elle conduisait à la perfection, une conduite douce et souple et sa conversation était agréable. En le déposant devant son immeuble elle l'invita à venir dîner un soir en compagnie de sa fille. Il répondit qu'il en serait très heureux, qu'il fallait voir avec cette dernière.

Elle redémarra. Le professeur, après un dernier signe de la main, gagna la porte et introduisit la clé dans la serrure. Mais avant qu'il ait pu entrer un individu à cheveux gris et vêtu de gris s'approcha, l'air peu aimable.

Le professeur se figea :

- Je vous préviens, j'ai très peu d'argent sur moi.

L'homme le prit brutalement par le bras et le fit entrer dans la cour.

- Allons chez toi !" dit-il.

Le professeur obtempéra, bien conscient qu'il n'aurait pas assez de force pour résister.

Il espérait ardemment que Philippe allait l'appeler, s'inquiétant de savoir s'il était bien rentré. Il trouverait alors un moyen de lui faire comprendre la situation délicate dans laquelle il se trouvait.

L'homme referma à clé derrière eux. L'angoisse étreignit le professeur comme un étau.

- Que me voulez-vous ? demanda-t-il.

L'homme le détaillait des pieds à la tête.

- Vous êtes bien le professeur X qui œuvre dans l'association d'aide aux victimes ?

AEV 1617-14 c'est dangereux

Le professeur hocha la tête.

- Et vous avez oublié de vous occuper de cette jeune femme, ma fille, qui s'est retrouvée seule sur le point d'accoucher. Elle a perdu son bébé, mort de froid dans la rue, et personne n'a daigné poser un regard sur elle et sa détresse.

- De qui parlez-vous ? Nous nous préoccupons toujours de tout le monde, sans distinction de rang, de situations ou de race. Mais vous-même, pourquoi ne vous êtes-vous pas soucié d'elle dans ce moment de grande détresse ?

- Je n'ai aucun talent comme sage-femme, ricana l'homme.

- Amenez-la nous. Nous ne pourrons certes pas lui rendre son bébé, mais nous pourrons certainement lui apporter un soutien psychologique et matériel dans la mesure de nos moyens.

- Bien sûr ! ricana l'homme de nouveau, De toute façon vous pensez qu'elles sont bêtes toutes ces femmes qui veulent un bébé. Pourtant ma fille n'en voulait pas mais elle ne voulait pas non plus le perdre.

Le téléphone sonna, l'homme fit signe de répondre. C'était Philippe :

- Vous allez bien ? Vous êtes bien rentré ?

- J'ai un petit souci.

Philippe sentit qu'il n'allait pas développer davantage.

- Voulez-vous que je vienne ?

- S'il vous plait !

Philippe se pressait, inquiet. Il y avait longtemps qu'il n'était pas allé jusqu'au domicile de son vieil ami, et brusquement lui revint le souvenir de cette jeune femme qu'il avait aimée et qui l'avait aimé. Il entendait à nouveau les mots qu'elle murmurait contre sa peau. Une bouffée de nostalgie vint se mêler à l'inquiétude qu'il éprouvait.

Il se secoua. A quoi bon regretter, ce temps-là ne reviendrait pas, il fallait simplement souhaiter ne pas croiser, au domicile du Professeur, sa fille chérie.

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