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L'Atelier d'écriture de Villejean
2021-04 mots arabes
6 octobre 2020

L'Alezan / Anne-Françoise

AEV 2021-04 Anne-Françoise - AlezanSur l’azur se détache le pur-sang alezan du sultan

Azur et alezan
Une palette poète
Des couleurs qui se complètent
L’alliance parfaite
Le sable et la mer
L’ambre et le lapis-lazuli
La merveilleuse alchimie

L’alezan se cabre et se cambre
Albatros et gazelle
Derviche et djinn
Folles voltes et arabes arabesques
Puis sans bruit
Dans le désert
Il s’enfuit
Faisant voler le sable
Tandis que tombe la nuit

Dans mon mazagran bleu
Ma cuillère galope, tourne et tourne, envoûtée
Dans les volutes chaudes de mon café
Elle crée et recrée le spectacle et son étrangeté.

Je m’appelle Shéhérazade.

AEV 2021-04 Anne-FRançoise - Shéhérazade

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6 octobre 2020

Le Philtre d'amour / Anne-Françoise

AEV 2021-04 Anne-Françoise - philtre d'amour

Elixir de jouvence
Philtre d’amour
Potion magique
De quoi tout cela a-t-il goût ?

Sucré, salé, amer, acide ?
Fruité, boisé, floral, santal ?
Jasmin, cumin, benjoin, tamarin ?
Ambre, camphre, nacre, alcool ?

Ces boissons laissent-elles un goût d’argousin dans le gosier ?
Je ne sais pourquoi mais j’ai idée
Que tout ça ce ne doit guère être bon
Et que le plus enchanteur doit encore être le nom !

A bien y penser,
Je crois que je préfère savourer
Au calme, dans mon canapé,
Mon habituel petit café.

AEV 2021-04 Anne-FRançoise - café

6 octobre 2020

Zouave ! / Marie-Thé

AEV 2021-04 Marie-Thé - zouave 2

En rangeant mon grenier pendant le confinement, j’ai retrouvé une photo datant de 1928 sur laquelle figure mon père lors de son service militaire en Algérie. Allure fringante, barbe frisottante, culotte bouffante, chechia avec pompon. Il est vraiment beau mon père dans son habit de zouave ! Pas étonnant que ma mère ait succombé à ses charmes. Je l’ai souvent entendu dire : « Viens te reposer sur le divan, ma gazelle ! ».

Elle répondait du tac au tac qu’elle s’appelait Jeanette, qu’il n’était plus dans le désert avec ses fatmas. Elle était jalouse de ses aventures amoureuses qu’elle imaginait extraordinaires. Des algarades de ce genre, il y en avait souvent entre eux.

La vue de cette photo a fait ressurgir les souvenirs de ce qu’il racontait quand j’étais petite. Il aimait parler de ses randonnées à dos de chameau dans le Sahara, des nuits glaciales dans les dunes, des thés ou des caouas, avec un chouia d’alcool sorti on ne sait d’où, de couscous, de moussakas, de tagines, de tous ces mets exotiques aux senteurs de carvi, de cumin ou de curcuma, préparés au harem derrière les moucharabiehs.

Chaque repas de famille était l’occasion pour lui de raconter des aventures que nous, ses enfants, connaissions par cœur. Avec le temps, elles s’étaient transformées. Il était devenu un zouave sauvant un homme assoiffé perdu au milieu des sables ou bien il galopait dans le désert, au hasard, sur un alezan, pendant des heures et revenait épuisé à la caserne où les autres zouaves enviaient son audace.

Mon père a espéré toute sa vie revoir l’Algérie. Il a disparu avant de pouvoir réaliser son rêve.

6 octobre 2020

Le Journal de Nazim le fou / Jean-Paul

Derrière le moucharabieh je regarde sans être vu :

- celle qui boit son caoua sans y mettre de sucre ;
- celle qui rêve d’une cange pour aller aux sources du Nil ;
- celle qui met dans son cabas des aubergines ;
- celle dont la jupe est trop courte ;
- celle dont la nuque est envoûtante ;
- celle qui connaît l’arithmétique et sait la fièvre de l’algèbre ;
- celle qui croit que la Terre est bleue comme une orange.

Derrière le moucharabieh je regarde sans être vu
Et de toutes ces belles je me fais un harem
Pour toutes les nuits sans lune où je dormirai seul.

moucharabieh-iv

***

C’est l’Hiver qui arrive pour geler nos glaouis,
Pour semer la jachère.

Peau de zob au jardin !
Pénurie d’épinards !
Macache d’estragon !

Sans tambour ni trompette
Il nique le safran,
Fait pourrir les pastèques
Et, gabelou furieux,
Jette sur tout cela la neige artificielle
Des nuits de satin blanc
Dont je maudis le bues
Pour que les caïds de Dubaï
Se voient en nababs du climat
Qui ont décroché la timbale.

***

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Calfeutré dans mon souk
Je chante sur mon luth
Mes sourates de fanfaron.

Je sors de ma guitare
Le navire amiral de mes chansons maboules.

Je suis Nazim le fou au coffret de santal,
Aux notes de jasmin,
L’assassin du sultan
Qui préfère au calibre P 38
Le goudron du barouf
Et la plume d’albatros
A la sauce Baudelaire
Pour moquer ces vizirs mesquins.

***

1098-moucharabieh1

J’ai assez d’alcool dans mon alambic
Pour provoquer des algarades
A la limite de l’abracadabrantesque.

J’ai assez de café dans mon grand mazagran
Pour Balzacer des nuits entières
Un almanach de gilet jaune.

J’ai assez de haschich dans ma jarre
Pour fumer des naseaux
En alezan superbe
Et tendre mes madragues
Sur l’échine des bardots.

Mais je n’ai pas l’âme d’un cador
Et n’infligerais pas aux raïs d’un quintal
L’échec et mat funeste.
Tant pis pour eux s’ils ont roqué côté cimetière !

Ces fakirs ne valent pas un clou !
Ces momies qu’un toubib conserve dans le talc
Ne sont que moussaka moisie
Abricots secs, brêles, zéro, camelote.

Moi
Sur une feuille de nénuphar géant
Je chevauche le sirocco.

Par le truchement du rêve et de la poésie
Je remplis le zénith de mes « Wali-walou ».

Je plante un baobab au sommet chamarré
D’un Everest divin.

Je peins en zinzolin
La nouba des girafes
Et fais pleuvoir la limonade et l’orangeade
Sur les ayatollah traîne-savates.

J’envoie par sarbacane
Une mousson de loukoums
Engluer les émirs
Et, en baroud d’honneur digne d’une Odyssée,
Je fais razzia totale sur l’arsenal de toutes bougies
Pour qu’on ne puisse plus connaître
L’âge du capitaine
Quand je mange le moka
Sans en laisser bésef.

C’est vrai je suis comme ça, moi, lorsque j’ai forcé
Sur l’alchimie des mots et mon péché mignon,
L’eau de fleur d’oranger.

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Calligraphie de Lassaad Métoui

***

Ai-je bien raconté ma vie de patachon ?
Ai-je bien massicoté au cimeterre d’argent
Votre cafard de confiné·e·s ?

Voyez-vous bien l’azur par le moucharabieh ?
Ne l’oubliez jamais :
Le ciel vous appartient !

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