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L'Atelier d'écriture de Villejean

12 décembre 2023

En noir et blanc / Maryvonne

AEV 2324-12 - Marivonne - En noir et blanc 1 AEV 2324-12 - Marivonne - En noir et blanc 2 AEV 2324-12 - Marivonne - En noir et blanc 3 AEV 2324-12 - Marivonne - En noir et blanc 4

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12 décembre 2023

Y'a d'la joie ! / La Licorne

 

Y'a d'la joie
Bonjour, bonjour, les demoiselles

Y'a d'la joie
Sous le ciel gris, coeurs en émoi

Y'a d'la joie 
Et de la pluie dans les ruelles

Y'a d'la joie
Partout, y'a d'la joie

 

Y'a d'la joie
La tour Eiffel est tellement belle

 Y'a d'la joie
Je bondis sans savoir pourquoi

Y'a d'la joie
Bonjour, bonjour jeunes demoiselles

Y'a d'la joie
Partout, y'a d'la joie

 
Y'a du monde 
Dans les galeries, dans les musées, 
 
Y'a du monde 
Qui lorgn' sur vous, belles demoiselles,
 
Y'a du monde 
Qui fait semblant d'se cultiver
 
Y'a du monde 
Partout y'a du monde
 
  
Y'a du monde 
Devant vos charmes naturels
 
Y'a du monde 
Le Louvre ne désemplit pas
 
Y'a du monde
L'homme à l'imper c'est moi, bordel
 
Y'a du monde 
Partout, y'a du monde
 
 
 
Mais ...y'a des fois 
Je vous l'avoue, chère demoiselle,
 
Y'a des fois   
Sous le ciel gris, par temps de chien
 
Y'a des fois  
Où je m'assieds dans la ruelle
 
Y'a des fois 
Je n'sais plus très bien
 

 Y'a des fois 
Quand mon coeur vacille et chancelle
 
Y'a des fois 
 Où, oui, c'est vrai, oui, je m'assois
 
Y'a des fois 
Où je retrouve ma vie de chien
 
Où sans toi(t) 
Je ne suis plus rien
12 décembre 2023

N comme Nappe à carreaux / Adrienne

12 décembre 2023

Il faut s'en remettre au hasard / Jean-Paul

Elliott Erwitt - California kiss 1956

Il faut s’en remettre au hasard. J’aurais pu ce soir proposer à l’atelier d’écriture dont je suis l’animateur des poèmes publiés dans le magazine La Croix-L’hebdo ou des images de sa rubrique « L’Art et la manière » dans laquelle un journaliste analyse une œuvre d’art.

Or il se trouvait parmi celles-ci, la photographie prise par Elliott Erwitt du fameux « Baiser californien ». Alors j’ai fait le lien avec l’information nécrologique entendue il y a peu sur France-Culture le 29 novembre, date de son décès.

En conséquence – ou du coup, si on préfère – je suis allé voir ses autres photos sur Internet et je n’ai pas été déçu de mon voyage internautique.

Il faut s’en remettre au hasard. Mais en est-ce un vraiment ? En ce moment mon passionnant livre de chevet s’appelle « Un Livre à soi ». C’est un recueil de textes divers de Francis Scott Fitzgerald. De ce fait j’ai regardé récemment un documentaire sur les rapports entre Hemingway et Fitzgerald. Et du coup je lis aussi « Paris est une fête » du gars Ernest. Définitivement, je préfère Francis ! Et me voilà donc avec un troisième voyageur américain, plus tardif, qui s’en vient jeter un œil digne du Droopy de Tex Avery sur le beau pays de France où du reste il est né en 1928 et qu’il a quitté à l’âge de huit ans.

Il faut s’en remettre au hasard. Parmi les quinze photos proposées j’ai choisi, le premier, celle-ci, prise au château de Versailles.

Elliott Erwitt - Versailles 1975Elle ressemble terriblement à un dessin de Jean-Jacques Sempé. Sous le regard étonné d’un Louis XIII jeune ou d’un quelconque courtisan ou ministre de Louis XIV à qui on vient d’interdire l’usage du 49.3 trois visiteurs du château sont en arrêt devant un tableau noir au centre duquel ne figure qu’une étiquette blanche. Non, ce n’’est pas un tableau de Soulages revu et corrigé par Malevitch !

Je subodore qu’il est inutile d’interroger le gardien qu’on voit de dos en train de se dégourdir les jambes. Nous ne sommes pas dans la photo mais devant et si on peut toucher son épaule du bout de l’index, ça ne lui fera rien, il ne sentira rien. Et donc pour savoir ce qui est écrit sur le papier au milieu du tableau il faut peut-être agrandir l’image.

Moi je préfère m’en remettre au hasard et encore plus à mon imagination folâtre. Je décrète qu’il est annoncé : « Isaure Chassériau a quitté son tableau le 1er avril 1999. Nous sommes sans nouvelles d’elle depuis ce jour. ».

 

Isaure 1024

Sans doute est-ce la position des bras de la petite fille, presque identique à celle de la dame en rose du Musée des Beaux-Arts de Rennes qui m’a rappelé cette histoire sortie de mon cerveau d’hurluberlu notoire.

***

One silver dollar… S’il y a bien quelque chose de commun à ces trois voyageurs américains, Fitzgerald, Hemingway, Erwitt, c’est bien leur absence de réticence à parler d’argent.

Le texte le plus drôle de « Un livre à soi » est ce long chapitre ou Scott et Zelda, riches de leurs 36000 dollars gagnés l’année précédente viennent s’installer, en 1924, sur une Côte d’Azur encore déserte. Ils alignent séjours à l’hôtel, locations de villas luxueuses avec nurse, domestiques, jardinier, achat de voiture, restaurants et fêtes bien alcoolisées. Ils auront vite fait de tout dépenser sans s’en rendre compte.

Hemingway, encore inconnu, vit pendant ce temps-là avec femme et enfant dans un quartier populeux de Paris avec un maigre salaire de journaliste, correspondant en France d’un journal de Toronto. Pour arrondir ses fins de mois il va jouer aux courses, gagne parfois mais juge plus prudent de s’arrêter. Paris est une fête dans laquelle il tient le rôle du pauvre et les portraits qu’il dresse des autres exilés américains ne sont pas très flatteurs.

Elliott Erwitt - Lucienne Van Kan 1954Pour Erwitt, on ne sait pas, mais ce cliché, par exemple, là où je l’ai récupéré sur Internet, sur un site de vente d’oeuvres d’art, est vendu 7000 $. On est d’accord : c’est l’oeuvre d’un photographe prestigieux, reconnu, publié, exposé.

Mais cette photo, prise en 1954, qu’a-t-elle d’exceptionnel ? Qui est cette dame? Consulte-t-elle son livre de comptes ou procède-t-elle à la lecture de « L’Adieu aux armes » sur la table de sa cuisine ?

J’ai déjà oublié son nom de baptême. De la bouteille dans le coin en bas à droite de la photo carrée, si je m’en remets au hasard et à ma mémoire, je peux juste dire qu’elle me fait penser au mot « grappa ». A tort, du reste. C’est plutôt là le conditionnement des bouteilles de chianti qu’on voit là. Quelquefois le hasard se trompe !

7000 $ ! Il doit certainement me manquer un neurone mais pour ma part, je ne me pose jamais la question de la valeur financière de ce que j’ai acquis ou fabriqué moi-même. Peut-être que la photo de mes grands-parents avec leurs enfants à Karpacz en Pologne en 1950 vaut plusieurs milliers d’euros ? De toute façon je ne la vends pas, ni aucune de celles, nombreuses que j’ai prises moi-même. Elles n’ont pas de prix.

***

Il faut s’en remettre au hasard : il est parfois très drôle. Ce matin j’ai failli photographier, depuis le bus qui m’emmenait à Beaulieu, alors qu’il était arrêté au feu rouge de l’avenue Janvier, une classe de moutards de maternelle qui attendait l’ouverture des portes du Musée des Beaux-arts pour aller faire la connaissance d’Isaure Chassériau. Ils avaient tous des gilets fluo oranges, roses ou jaunes. D’autres individus plus virulents auraient tiré au LBD dans ce tas d’indisciplinés mais j’ai respecté leur droit à l’image et j’ai surtout eu la trouille d’être dénoncé après publication comme photographe pédophile.

Oui, le hasard est drôle. La troisième image qui me revient lors de ce jeu de logorallye tournant – l’animateur d’atelier a retrouvé pleinement son rôle de parfait sadique ! - est celle-ci :

Elliott Erwitt - Prado madrir 1995

Elle me rappelle la première émission de radio entendue ce matin : une longue enquête sur les pratiques machistes de Gérard Depardieu et les excès de ces messieurs du cinéma. Cela réveille une autre trouille, celle de vivre dans un monde où toute partition masculine est examinée à l’aune de #metoo et des nombreux bémols qu’on peut souligner chez tous ces mâles très mal élevés.

Heureusement il nous reste le rire. Et là, en terminant, je dis « Merci Elliott ! ». Cette photo là ne vaut pas 7000 $, elle vaut 10 ! 10/10 ! Elle n’a pas de prix !

Les sept samouraïs figés devant la femme nue et la dame seule devant le tableau voisin où le même modèle pose habillé, c’est du hasard ou bien de la nature humaine ? A qui s’en remettre pour savoir ? Celle-là, comme on dit chez moi, tu me la copieras !


Pondu à l'Atelier d'écriture de Villejean le mardi 12 décembre 2023

à partir de la consigne AEV 2324-12 ci-dessous

5 décembre 2023

Consigne d'écriture 2324-11 du 5 décembre 2023 : La Lettre de Coralie

La Lettre de Coralie

 

Mais qu’est-ce qui lui a pris à Paolo d’aller fouiller dans cette valise, pleine de cahiers et de lettres, qu’il avait presque oubliée dans son grenier ? Voilà qu’il y a trouvé une lettre adressée à Giambattista, son meilleur ami de ses années de jeunesse, par une certaine Coralie dont il ne se souvient absolument plus. Il est dit dans ce courrier que Paolo devait transmettre la lettre où elle déclare son amour à Giambattista à l'intéressé et, visiblement, il ne l’a pas fait.

Quarante-trois ans après Paolo ne voit plus Giambattista, Giambattista et Marianna ont divorcé et on ne sait rien de plus de Coralie qui, d’après la signature ambiguë, se prénommait peut-être Caroline.

Faites parler un ou une de ces quatre personnages à propos de cette lettre, de cette époque, de son statut actuel de sexygénaire ou de la gestion de ses archives personnelles.

Ou racontez une histoire similaire de lettre retrouvée ou perdue.

AEV 2324-11 Coralie ou Caroline - signature

***

Mardi 15 avril 1980

Giambattista

Pourquoi ne pas écrire « cher » ou « très cher Giambattista » ? me diras-tu ? Je m’explique : ce genre d’expression me paraît débile et trop conforme aux lettres que l’on envoie à une personne que l’on a connue et que l’on flatte en pensant du plus profond de soi-même « Il faut être amical, elle ou il peut toujours être utile !!! » C’est une forme d’hypocrisie dissimulée qui me sort particulièrement par les yeux. Evidemment ce n’est pas général puisque je l’utilise fréquemment lorsque j’écris à des parents. Je ne suis pas pour autant hypocrite !!

Le terme est différent quand j’écris à des amies : « Mon Hélène chérie » « Ma Sylvia adorée », des filles que je connais depuis longtemps et que j’aime profondément. Je ne me vois pas t’appeler « Giambattista chéri » (c’est plutôt commun et … comique) mais c’est un avis comme un autre ; au fait, Marianna t’appelle-t-elle CHÉRI » ?

Aussi t’appellerai-je Giambattista, c’est tout con mais ça me plaît. Peut-être trouveras-tu cette lettre différente de la première qui était un peu débile (rien qu’un peu !!) et quelque peu gamine !!! Mais il paraît que c’est agréable de rester gamine, même quand on a 19 ans, et même quand on passe son bac dans quelques mois… Je dois dire que j’appréhende ce foutu examen qui de plus est décisif pour moi et mon avenir ; j’ai tellement fait la conne que maintenant je m’en mords les doigts, tu comprends, cela signifie tellement de choses pour moi, entre autre, la liberté… La liberté de dire merde à tout le monde et d’envisager mon avenir comme je l’entends…

Si je l’ai j’aurai quartier libre pendant toutes les vacances et je pourrai même venir te voir… Ça, ça serait le PIED, si du moins nous communiquons (critique du téléphone because : on ne se voit pas...) toujours!

En fait c’est la première fois que je sors avec un homme marié (quoique très très libre) et je dois avouer que ce n’est pas si terrible… Il y a quelques années je l’aurais très mal pris, je me serais accusée, peut-être à tort ; les principes, ce sont les gens qui nous les inculquent, c’est pourquoi maintenant tout ceci me passe au-dessus, je dois avoir mûri mais je dois dire que je me fous complètement de ce que les gens peuvent penser de moi et des relations que j’entretiens ; je ne suis pas insensible, au contraire, mais j’estime être réaliste et droite (pourquoi chercher le mal, je suis bien, ainsi).

Tu croiras peut-être que je me confie et sur un certain point tu auras raison car j’avais envie de te l’écrire et si tu veux nous en parlerons. Cela doit t’énerver que j’écrive toujours « peut-être » mais il y a quand même 222 kms qui nous séparent et les impondérables ne sont pas exclus….

Ce qui est certain c’est que j’ai envie de te revoir ; je ne sais pas comment te l’expliquer car je n’ai pas envie de faire de sous-entendus, si sous-entendus il y a… En fait on cherche toujours des complications alors que les choses peuvent se dire si facilement… Voilà ! Je le dis et le répète : j’ai hâte de te voir et tu me manques ».

Je ne sais quand cette lettre t’arrivera, cela dépendra de Paolo.

Moi aussi, j’ai envie de t’embrasser

Coralie

***

L'auteur de cette consigne demande à Caroline-Coralie de bien vouloir excuser l'extrême goujaterie dont il fait preuve. Nous savons tous que ça ne se fait pas de publier du courrier privé sur Internet. Même s'il y a peut-être prescription au bout de quarante trois années ! ;-)

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5 décembre 2023

Le Mystère de la lettre retrouvée / Marie-Thé

Bonjour Coralie,

Que s’est-il passé dans ma tête en avril 1980 pour que je ne remette pas à Giambattista, mon meilleur ami, une lettre que vous lui aviez écrite ?

Cette lettre, je la retrouve aujourd’hui avec stupéfaction, en mettant de l’ordre dans ma correspondance. J’hésite à l’ouvrir, je la mets de côté.

Dans la nuit, cette lettre m’obsède et m’empêche de dormir. Alors, n’y tenant plus, je me lève. La curiosité l’emporte et j’ouvre l’enveloppe.

C’est alors que ce que j’ai enfoui au fin fond de ma mémoire pendant plus de quarante ans m’est revenu comme un boomerang. J’en rougis encore.

AEV 2324-11 Marie-Thé - jupe arc-en-ciel

Chère Coralie, vous étiez belle. Cet été-là, vous portiez une jupe longue aux couleurs arc-en-ciel qui s’ouvrait lorsque vous marchiez et découvrait vos jolies jambes. Lorsque, discrètement, je jetais un œil dans le décolleté de votre tee-shirt rouge moulant, je ressentais un émoi. Bref, j’étais amoureux de vous mais la timidité m’empêchait de vous aborder. Le monde appartient aux beaux parleurs. Hélas, je n’en faisais pas partie.

Lorsque vous m’avez confié cette lettre pour Giambattista que je devais revoir la semaine suivante, j’étais désespéré. J’ai déposé la missive dans une valise avec d’autres courriers puis je l’ai oubliée.

C’est à moi qu’elle aurait dû être envoyée, surtout pas à Giambattista, qui déjà était marié et peut-être bientôt père de famille !

Aujourd’hui, je me pose des questions :

Est-ce que j’ai sauvé le mariage  de Giambattista ?
Est-ce que je vous ai privée d’un grand bonheur ?

Désolé, chère Coralie, la jalousie m’a fait perdre la tête.

Je vous renvoie cette lettre. Vous pourrez la détruire et l’oublier. Ou bien ranimera-t-elle la flamme, comme le chantait si bien Jacques Brel :


« On a vu parfois,
Rejaillir le feu,
D’un ancien volcan,
Qu’on croyait trop vieux » 

5 décembre 2023

Chère ou très chère inconnue / Maryvonne

Il est bien dommage que sur cette lettre tu ne laisses pas d'indices pour que nous puissions te retrouver et dénoncer le traître qui a retenue prisonnière cette missive dans une valise. Ceci-dit j'aimerais voir la tronche de la valise, sa geôle pendant tant d'années, poussiéreuse à souhait je pense. Si au moins la lettre avait été avec quelques autres assemblée et nouée par un joli ruban bleu ou rose que l'on appelle une faveur !

Faveur ? Désolée tu n'en as eu aucune de la part de cet individu qui déclare ne pas avoir de mémoire, l'enfoiré ! Ceci n'est pas dû à sa mauvaise foi, vu qu'il n'a pas non plus de bonne foi pour agir de la sorte.

AEV 2324-11 Maryvonne - Aldo Macione

 J'ai une théorie : je pense qu'il y a de la part de Paolo à un acte manqué. Il se dit : « Déjà que Giambattista est marié et qu'une petite peste de 19 ans s'intéresse à lui, c'est beaucoup pour un seul homme !». Paolo, lui, est célibataire et il se dit qu'il n'y a pas de justice et retient la lettre dans l'espoir d'annexer pour lui-même cette jeune Caroline.

Ça lui tourne un peu la tête et après avoir tergiversé, il se retrouve un peu honteux, parce qu'au fond c'est un brave garçon et aujourd'hui il habille sa honte en oubli. Le mot « chéri » dans cette lettre agit comme un mantra qui lui fait tourner les sangs.

Il apprend par cette missive que son copain est très libre. Le con ? Et bien son subconscient lui envoie : très libre ? Alors il ne fera pas longtemps avant d'en trouver une autre. Pourtant ce qui le fait enrager c'est « Qu'est-ce qu'il a de plus, ce rital, qu'un mec comme moi ? ».


AEV 2324-11 Maryvonne - RitalMais ta phrase qui le tue c'est « Je ne sais quand cette lettre t'arrivera, cela dépend de Paolo ». Eh bien jamais ! Paolo décide la censure, ainsi cet amour illicite ne sera pas.

Ce n'est pas qu'il se joue en père « La morale » mais simplement en jaloux et la jalousie peut pousser à de mauvaises actions.

Aujourd'hui le temps à passé, il a un peu honte en pensant qu'il a peut-être fait couler des larmes et qu'une belle histoire a sombré par sa faute.

Il essaie de se racheter en partageant avec nous cet échec mais il aura beau faire et beau dire : cette missive restera une lettre morte.

5 décembre 2023

La Lettre / La Licorne

 

 "On n'est pas sérieux quand on a dix-sept ans"...disait Arthur. 

C'est vrai. C'est l'âge des premières amours, de celles qui vous fendent le coeur en deux, en quatre, en huit...et qu'on n'oublie jamais. 

C'est l'âge où les filles tracent des lettres aussi rondes que leurs joues d'adolescentes, l'âge où elles font aussi des bulles sur les i, parce que c'est plus joli...l'âge où elles sont romantiques et encore innocentes, souvent.

C'est l'âge où les garçons veulent avoir du succès, l'âge où ils veulent montrer aux copains qu'eux aussi, ils ont des flirts, des conquêtes, l'âge où ils collectionnent les filles comme ils collectionnaient les billes...il n'y a pas si longtemps.

Alors, quand, à la sortie du lycée, la voisine de Paolo a glissé une enveloppe dans sa main en lui disant tout doucement : "Donne-la à Giambattista, s'il te plaît...c'est important", Paolo n'a pas trop écouté ce qu'elle disait...il a surtout vu ses yeux de biche et son sourire de miel, son cerveau s'est brouillé et il est rentré chez lui en serrant la lettre très fort.

Dans sa chambre, il a déchiré l'enveloppe et il a lu les mots. Dès le début, il s'est rendu compte de son erreur. "Cher Giambattista ! ". Bien sûr...ce n'était pas pour lui...c'était toujours pour le beau JB que leur coeur battait. C'était toujours lui dont la boîte à lettres s'emplissait de mots doux, tandis que la sienne restait désespérément vide.

Cette fille, il la connaissait à peine. Il l'avait croisée plusieurs fois dans les couloirs, mais il aurait été incapable de dire comment elle s'appelait. D'après la signature, c'était Coralie. Bizarre, cette signature, d'ailleurs. Elle finissait en "sac de noeuds"...sûrement une fille à problèmes.

Le message était d'une mièvrerie confondante. "Je te regarde pendant les cours et chaque jour, je t'aime davantage. Maryline m'a dit que tu lui avais dit que tu trouvais que j'avais de jolies lèvres. De celles qu'on a envie d'embrasser. Moi aussi, j'ai envie de t'embrasser."

Ah, les filles ! Toutes plus "nunuches" les unes que les autres. Mais quand même, il a de la chance, JB. Moi, avec mon acné et mes lunettes, je ne fais rêver personne. Si ce n'était pas mon meilleur pote, je la jetterais à la poubelle, cette lettre pleine de sentiments sucrés. Mais, bon, je ne peux pas lui faire ça. Je vais l'appeler :

"Allô , Mme Facchini ? Oui, vous pouvez me passer Giambattista, s'il vous plaît ? Merci à vous ! Bonne soirée, Madame. Allô, JB ? C'est Paolo. Dis, y'a une fille qui m'a donné un mot pour toi, à la sortie de la classe. Une brune, avec les cheveux longs. Son nom ? Coralie. Tu ne connais pas de Coralie ? T'es sûr ? Pourtant, c'est ce qui est écrit sur l'enveloppe : "De la part de Coralie", avec un coeur sur le "i".. Que je jette la lettre ? Tu as assez d'admiratrices en ce moment ? Tu ne veux pas t'encombrer d'une greluche de plus ? Bon, ben...écoute, c'est comme tu veux. On se voit demain, au foot, OK ? Oui, j'apporte le ballon. A bientôt, JB !"

Paolo avait jeté la lettre sur son bureau, au milieu d'un tas d'autres papiers. Et puis, le lendemain, la vie avait repris. Le foot, les amis, il avait fourré les papiers dans un tiroir et puis il avait oublié. 

43 ans plus tard, alors qu'il vient de prendre sa retraite, il se dit que c'est le moment de trier la valise dans laquelle il avait entassé, pêle-mêle, ses cahiers et ses notes de lycée. Entre deux pages de philo, il tombe sur une enveloppe jaunie...et en parcourant les lignes, les souvenirs enfouis remontent soudain. La fille...JB...le coup de fil.

Il regarde la signature. Et quelque chose lui saute aux yeux. Caroline ! Le prénom de la fille , c'était Caroline ! Pas Coralie.

Caroline ? Nom d'un p'tit bonhomme ! Mais il connaît une Caroline...qui était au lycée en même temps que lui.

"Dis, chérie...ta soeur, qui est en maison de repos...Caroline oui...tu m'as dit qu'elle avait toujours été dépressive. Mais en fait, elle a commencé quand exactement ... sa dépression ? Ah.....l'année du bac ? Un chagrin d'amour ? Dont elle ne s'est jamais remise ? Pourquoi je te demande ça ? Oh, comme ça. Je me demandais..."

(Remarque : Je n'ai pas tenu compte du contenu intégral de la lettre, un peu trop explicite à mon goût. J'ai préféré imaginer autre chose,  juste à partir de la photo,  ça laissait plus de place à l'imagination...)

5 décembre 2023

Incognito-incognita / Jean-Paul

AEV 2324-11 JK - Very bad tripPaolo a raconté l'histoire de la lettre retrouvée à son épouse, Dame Sophia. Elle a bien ri, elle aussi.

Parce que Paolo est du genre hypermnésique, à se souvenir des noms des rues de Rome, des numéros des chambres d'hôtels où ils ont séjourné, des noms des personnages de romans, toutes ces données bien inutiles dont elle-même ne s'embarrasse absolument pas.

Or voilà que pour une fois Paolo est pris en flagrant délit d'oubli total ! Elle espère juste que ça ne va pas tourner au « Very bad trip 1, 2, 3 ou 4 » parce que tous les gens auxquels il raconte cette histoire se font un malin plaisir de l'accuser de tous les maux ou, tout simplement, de lui poser des questions qui l’enfoncent dans sa culpabilité.

- Est-ce qu'il y avait une enveloppe ? Peut-être y a-t-elle inscrit au dos son nom et son adresse ? a demandé Anna-Francesca.

- Et alors, si c'était le cas, je lui renvoie la lettre quarante-trois ans après, à la fille, en lui demandant de m'excuser parce que je ne l'ai pas transmise ? Et aussi une copie à Giambattista avec l'expression de ma penauditude - ça existe ? - devant ce forfait incompréhensible et pourtant peut-être décisif ?

***

AEV 2324-11 JK - Passe ton bacMais d'abord résumons les faits : Coralie, 19 ans, va passer son bac. Si elle le réussit elle aura le champ libre pendant les vacances et ira rejoindre Giambattista, « homme marié mais très, très libre » qu'elle a envie d'embrasser. Sauf qu'il y a 222 kms qui les séparent et « des impondérables ». Le plus embêtant des impondérables est ce Paolo qu’elle a chargé de faire passer sa lettre à Giambattista.

Quarante trois ans après Paolo retrouve la lettre au fond d'une valise et découvre qu'il n'a plus aucun souvenir de cette Coralie !

***

De la même manière que Marcel Proust est devenu le « maître-étalon » de la littérature bourgeoise contemporaine - mais de nos jours toute littérature est bourgeoise, l’autre terme de l’alternative étant le rap ou la chanson française écrite en anglais - le mètre étalon de la sagesse, pour Paolo, c'est Sophia.

Ce qui l'a rassuré c'est qu'elle a décrété, à l'emporte-pièce comme bien souvent, « Le passé, c'est le passé ! On ne revient plus dessus ! »

C'est vrai que Sophia n'a pas entreposé de valise de vieux papiers dans le grenier commun. A part des cours de psychologie et des bouquins du même domaine il n'y a rien de son passé à elle là-haut hormis trois disques de Joan Baez.

Quelquefois quand elle va chez son père, elle trouve des vieilles photos d'elle et ça ne lui fait rien, si elles ne lui plaisent pas, de les déchirer.

Mais Paolo n'est pas ici pour raconter sa vie ni celle de son épouse. A part cette histoire de lettre retrouvée et cette lubie de conserver des tas de photos, d'enregistrements sonores et cette valise d'avant le déluge, son existence à lui est trop simple, trop linéaire pour qu’on en tire de la littérature.

AEV 2324-11 JK - Gloria Lasso- Giambattista, a demandé madame Éliane, combien de divorces ?

- Moins que Gloria Lasso !

Madame Maryvonne, elle aussi, a gardé des lettres et quelquefois elle renvoie le paquet entier à son expéditeur ou expéditrice. Elle aussi farfouille dans son grenier et a retrouvé récemment un discours de départ en retraite qu'elle a écrit mais n'a pas prononcé. Alors, quinze ans après, elle l’a envoyé au récipiendaire qui lui a répondu dans le même style sincère mais amusant. Tous ces profs ont des lettres et sont très sympathiques !

Paolo est tellement noyé dans son mystère qu'il devrait envoyer cette lettre non au récipiendaire mais au récipient de flotte en lui disant qu'il ne comprend goutte ! Mais finalement il a écouté Sofia. Il s'est allongé sur le divan des filles à l'atelier psy. Il a raconté l'histoire, elles se sont bien moquées de lui et la semaine prochaine on parlera d'autre chose.

De toute façon avec la cassette numéro 4 de son frère il a trouvé encore mieux comme mystère. Mais c'est quoi cette musique de clavier funèbre ? Ça ressemble furieusement, si on peut dire, à un concert de musique planante comme « Cyborg » de Klaus Schulze et ça semble jouer du violoncelle ! C'est le magnéto qui déconne ou quoi ? La bande qui tourne à l'envers ? Même en accélérant grâce à Audacity la vitesse de l’enregistrement numérisé, ça ne ressemble en rien à ce qu'ils jouaient ensemble autrefois.

L’idéal - et c'est ce dont rêve Sophia - ce serait de le vider sans regarder ce qu’il contient, ce grenier. Parce que c'est terriblement mort ou mortifère, tout ça. Même sur les photos de classe, même dans la liste des gens avec qui on a fait de la musique, si on va interroger Internet avec leur nom, on s'aperçoit que certains d'entre eux sont déjà passés de vie à trépas, dont un à l'âge de 55 ans. Ça a un petit côté vraiment attristant, tout ça.

C'est pour cela que lors d'un prochain voyage de Sophia Paolo ira remettre la lettre de Coralie dans la valise. Par vice, il cherchera son enveloppe éventuelle et il priera. Il priera pour que la jeune fille ait eu son bac, qu’elle ait est rencontré un autre homme, marié ou pas, qui l'aura rendu heureuse et pour qu'elle soit maintenant une sexygénaire épanouie. Il priera pour qu’elle ait oublié ces deux jeunes crétins de Giambattista et Paolo. Ça devrait être d'autant plus facile à faire qu’elle n’a plus de lettres ni de l’un ni de l'autre dans son propre grenier !

AEV 2324-11 JK Eglise-San-Giovanni-e-Paolo-et-la-place (1)
 L'église San Giovanni e Paolo à Venise

28 novembre 2023

Consigne d'écriture 2324-10 du 28 novembre 2023 : Soixante-quatre cases

Soixante-quatre cases

 

Cette ville nouvelle été construite à l’image de certains quartiers de la ville de New-York. Neuf avenues rectilignes s’y croisent à angle droit, délimitant ainsi soixante quatre blocs d’habitation ayant la forme d’un carré parfait.

Utilisez les noms des quartiers et des personnages qui suivent pour raconter une tranche de vie à l’intérieur de cette ville.

La partie française - La partie anglaise - La rue du Fianchetto - Le Boulevard Traxler - Le quartier letton - La Tour blanche – La Découverte - La rue de Steenwijk - Restaurant de la Fourchette royale – Café de la Régence - Le square Tartacover - La statue du grand Turc automate - Le Pré catalan - L’Avenue de la Volga - La place de Budapest - Le Grand roc - L’Immeuble Gambit-Roi - La Casa Rossolimo - L’Orang-outan, café associatif – La piscine de l’Hippopotame – La M.J.C. Diagonale.

La Sicilienne - La Scandinave - La Hollandaise - Monsieur Nimzovitch - Madame Philidor - Monsieur Larsen - Monsieur Tarrasch - Madame Staunton - Monsieur Bird - L’évêque noir - Le cavalier Pieuvre - Emilie Paulsen - Sabine Maroczy - Miguel Najdorf - Robert Fischer - Gaby Marshall - Caro(line) Kann – Sophie Alekhine - Mlle Frauke Grünfeld - Olga Tchigorine - Marc Taïmanov, pion empoisonnant - Le docteur Hérisson.

Vous pouvez nous parler par exemple de Coralie qui se prépare à passer son bachot et est amoureuse d’un homme marié, de Mitsumasa, peintre japonais de passage, de Laure Manaudou venue disputer une compétition à la piscine Bogolioubov, du café « Le Diapason » où l’on joue aux échecs au son des concerts de rock ou de tout ce que vous voudrez bien imaginer dans ce cadre.

litterature

Illustration de Jonathan Wolstenholme

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