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L'Atelier d'écriture de Villejean
13 avril 2021

La Vie du facteur Cheval / La Licorne

AEV 2021-26 La Licorne DSCF3758

S'il est un facteur cher à mon coeur, c'est bien le facteur Cheval.

Ce facteur-là, il faut le dire, fut un postier assez spécial. Toujours sur les routes, puisqu'il effectuait sa tournée à pied, il transporta dans sa vie autant de cailloux que de courrier et sans doute même un peu plus. Jésus, Marie, Joseph ! Il fut le piéton le plus obstiné de toute l'histoire de la Poste, toujours à courir la campagne afin de trouver de nouvelles pierres pour son futur "palais". Il usa ses bottes sur les chemins, tout autant que les pneus de sa brouette, qui, en général, ne faisaient pas long feu.

Il s'en était fallu d'un cheveu qu'il ne soit jamais facteur car au départ, il était boulanger près de Lyon. Mais lui et sa boulangère, poussés par la misère, durent changer de métier, déménager et finalement poser leurs valises dans le village d'Hauterives. Il fut alors chargé de la "tournée de Tersanne", une tournée au rayon de distribution très large, une tournée pédestre de près de 30 kilomètres qu'il effectuera quotidiennement et consciencieusement jusqu'à sa retraite.

Dès lors, il transporta chaque jour dépêches, almanachs, bafouilles et liasses de lettres en tous genres et à peine en était-il allégé qu'il passait à son deuxième métier, celui qui lui tenait vraiment à coeur : constructeur de rêve.

Pendant 33 ans il collecta pendant ses longs voyages de facteur des tonnes et des tonnes de pierres, choisissant avec soin les plus étranges, les plus tarasbicotées, des pierres bizarres avec des creux, des bosses ou des dentelures pour les assembler selon une esthétique qui n'appartenait qu'à lui, une esthétique étrange et un brin "surréaliste" qui suscita d'abord les moqueries avant de susciter l'admiration.

Il en connut des doubles et des triples journées, des déjeuners sur le pouce, avec juste un bout de pain et un camembert, des coups de collier et des coups de feu quand l'orage menaçait et qu'il fallait faire vite. Il connut la fatigue extrême, les points de côté, les mains rouges et les soirs où, après être descendu au chantier, on remonte à la maison, chargé comme une mule, parce que l'on a peur de se faire voler un bloc de pierre particulièrement intéressant.

Il en connut des peines et des difficultés, oui, mais en bout de ligne, il arriva à son but : un jour, son "Palais idéal" fut terminé et ce jour-là, il s'assit et se sentit fier de ce qu'il avait réalisé.

Ferdinand Cheval, le petit facteur d'Hauterives, le maçon ambulant, l'architecte autodidacte, avait, grâce à sa ténacité hors norme, construit le Palais le plus original et le plus intrigant de toute l'Histoire et, enfin sédentaire, il pouvait maintenant, en toute tranquillité, s'y reposer comme un pacha ! (*)

(*) Ce qu'il ne fit pas, bien entendu...car, poussé par sa passion, il se consacra très vite à d'autres constructions...

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